exister

Extraits étiquetés avec : exister

  • Survivre, vital et existentiel

    Nous ne cessons de surmonter la difficulté non seulement de nous maintenir en vie (de résister à la mort), mais plus encore d'être effectivement vivants : de résister à la non-vie étiolant la vie. Survivre ne se limite pas au vital, mais s'étend à l'existentiel.

    Couverture de De la vraie vie
    page(s) 174
  • L’ébranlement émotionnel

    C'est seulement d'une incitation venant du dehors que peut se remettre en mouvement, en élan, sa vie ; ou que celle-ci pourrait sortir de l'inertie mortelle générant la non-vie. Je nommerai précisément l'« é-motion » ce pouvoir surgi du dehors de la vie dans la vie et faisant effraction dans la réification où se trouve entraînée, ne serait-ce que par homéostasie, la vie. Comme une vie enlisée est une vie qui ne rencontre plus, une vie réifiée, à sa suite, est une vie qui ne s'émeut plus.

    Aussi, de même que le désenlisement a son principe dans la décoïncidence faisant sortir la vie de son adaptation normée, de son adéquation installée, on dira que le propre de la déréification est de trouver son principe dans l’ébranlement émotionnel frappant soudainement la vie. Surgi à la transition du physiologique et du psychique, non seulement cet ébranlement de l'émotion remet en tension la vie, la sort de son apathie. Mais plus encore : il force la vie, par son intrusion, à se tenir hors et se mouvoir (e-movere), ne serait-ce qu'un instant, de son régime précédent de vie.

    Couverture de De la vraie vie
    page(s) 142
  • La rencontre, dépossédant le soi de soi-même, fait exister

    [U]ne rencontre – toute rencontre –, oriente à nouveau vers de l'autre, vers de l'extérieur qui n'est pas encore intégré, ravive du « contre » (le « contre » de la rencontre) et fait affronter. Par-là, une rencontre n'est jamais prédictible dans ce qui peut y arriver. Non seulement elle interrompt le cours s'enchaînant du temps et ravive du présent en le détachant du passé.

    Mais surtout, en dépossédant un tant soit peu le soi de soi-même, en ébréchant son autonomie et l'expulsant de son quant-à-soi, elle le porte à se « tenir hors » de soi et donc à proprement « ex-ister ».

    Couverture de De la vraie vie
    page(s) 121
  • L’inouï de la vie

    Commencer effectivement d'exister (entrer dans une « seconde vie ») sera procéder précisément à ce découvrement de la vie, ou commencer d'entendre son inouï – le reste (la vie « morale ») n'étant plus, alors, que de conséquence. Se vérifie du même coup, une fois encore, la différence de l'inouï et de l'inconnu. Si l'inconnu de la vie est ce que nous en réserve l'avenir et qu'on ne connaît pas (si l'on réussira, quand on mourra…), l'inouï de la vie est cet en soi de la vie – ou la vie dans son en soi – à quoi, parce qu'on ne cesse de le réduire par assimilation, on n'accède pas.

    Mais que cette vie se trouve soudain en danger, après un accident, la maladie, quand nous l'avons « échappé belle », cette vie enlisée alors se craquelle et laisse entre-voir, de dessous son recouvrement, dans sa fissure, son inouï. Devant la mort de l'Autre, nous effleure l'inouï de la vie.

    Couverture de L'inouï
    page(s) 142
  • Sortir du contentement et du confinement du moi

    [Si e]n donnant à entendre de l'autre qui s'extrait de toute assimilation à soi-même, l'inouï met en tension d'ex-istence, c'est que la capacité d'ex-istence est précisément d'excéder tout rabattement dans le déjà perçu - déjà pensé - déjà vécu. C'est en commençant de prêter l'oreille à l'inouï que l'on peut se hisser hors de son moi comme de son monde, sortir de leur contentement et confinement.

    Couverture de L'inouï
    page(s) 120-121
  • Se tenir hors

    Le lassant restreint et replie la vie sur un « soi » qui s'emmure et devient possessif ; et l'inouï la déploie, au contraire, et la rend expansive jusqu'au désemparement et dépossession d'un tel soi qui s'étiolait en soi. On est entré du coup dans une éthique de l'ex-istence, dès lors qu'on entend celle-ci comme la capacité de s'extraire et de « se tenir hors », ex-sistere, des conditions imparties et subies.

    Couverture de L'inouï
    page(s) 69
  • Le plus simple, le plus en rapport à l'existence

    Ce second temps est celui où l'on se détache à son insu de la compétence exercée, de la technicité dont on a acquis la maîtrise, non pas qu'on voudrait s'en débarrasser ou qu'on en serait déçu, mais, parce que, commençant de revenir sur ce chantier déjà avancé, on s'inquiète de ce qu'il a laissé échapper et qui toujours, au fond, est le même : le plus simple, plus élémentaire et plus radical, plus en rapport à l'existence même (ou le fameux « les choses mêmes »).

    Couverture de Une seconde vie
    page(s) 44-45
  • Liberté d'un sujet s'affranchissant de la clôture du moi

    La « liberté » […] n'est pas une donnée première, comme l'a voulu la métaphysique en dédoublant le monde et rompant l'expérience ; mais elle est au contraire, par désolidarisation d'avec la primarité imposée, une acquisition et accession secondaire du sujet, celle par laquelle précisément il se promeut en « sujet ». […]

    Reprise de sa vie qui n'a pas d'âge, réforme qui peut tôt débuter. C'est de là qu'une initiative commence de se dégager ; qu'une marge de manœuvre effective – donc de choix – peut résulter ; qu'une liberté peut effectivement apparaître : que, se dissociant du primaire de la première vie, donc aussi se désolidarisant d'avec son monde, un sujet s'affranchissant de la clôture du moi peut émerger. Il s'affirme alors en sujet ex-istant.

    Couverture de Une seconde vie
    page(s) 27-29
  • Reprendre sa vie

    [E]st-ce que je saurai me détacher de ma vie précédente – de ma vie enlisée en son monde – pour débuter un nouveau jour ? Ou pour éclairer cette question dans sa condition : est-ce que je suis parvenu, à ce jour, à tirer parti de ma vie passée pour, revenant sur elle et m'en décalant, ne plus répéter ma vie, mais la « reprendre » : pour pouvoir réformer ma vie et commencer enfin effectivement d'« exister » ?

    Cette interrogation, il est vrai, on peut la maintenir au niveau de l'actuel marché du développement personnel et du bonheur, en vue de s'y assurer à moindre frais. On peut la garder dans le cadre des banalités bien rabotées de la sagesse, y quêtant une résignation plus ou moins enjouée. Mais on peut aussi vouloir l'affronter philosophiquement pour y chercher une issue plus audacieuse, autant dire qui soit inventive.

    Couverture de Une seconde vie
  • Plaisir d’exister et d’être soi

    La joie dont je parle ici est moins l'émotion réactive aux événements extérieurs favorables que la jubilation intérieure qui anime toute vie, qui exprime sa puissance naturelle d'être et d'agir. C'est la joie de vivre, le plaisir d’exister et d’être soi que nous ressentons tous depuis l'enfance et qui forme la source éternellement vive et active de tout bonheur.

    Couverture de L’expérience du bonheur
    page(s) 37
  • Un fond invulnérable

    Même les petites variations (qui font l'impressionabilité), les petits changements de sensations, de communications avec notre propre corps, et avec les muscles dont nous sommes le tendeur ardent, ou simplement éveillé, disparaissant de façon spectaculaire, ne laissant qu'une impression d'existence, de souveraine, unique, immodifiée existence, d'existence dans un fond, un fond intouchable, invulnérable, échappant à tous et à tout, impression enfin d'essence, sans variété, sans attributs.

    Couverture de Connaissance par les gouffres
    page(s) 62
  • Habiter pleinement la vie

    En sanscrit, [la méditation] se nomme bhavana. Le terme est usité dans le langage de l'agriculture pour désigner le fait de « cultiver » la terre. Il désigne par extension la culture de l'esprit : c'est-à-dire libérer celui-ci de ses impuretés et de ce qui le trouble.

    Mais essayons d'aller plus loin. Bhava est un nom possible de l'être que l'on retrouve par exemple dans l'anglais to be (être) et dans l'allemand ich bin (je suis). Il désigne le sens de l'être lorsqu'il se déploie en existence. Bhava ne désigne pas un simple état mais cette activité  tout à fait singulière qu'on appelle exister ou même vivre. Certains sanscritistes établissent un rapport étymologique possible entre le grec bios (vie) et le sanscrit bhava. Méditer, compris à partir de bhavana, signifie habiter pleinement sa vie, créer un lien de familiarisation avec son être, cultiver son existence.

    Il existe enfin une autre acception de bhava, bhavam kri, qui veut dire éprouver, faire l'épreuve de quelque chose. Or tel est bien le cœur même de la méditation qui consiste à faire l'épreuve de la vérité de notre être.

    Couverture de La méditation
    page(s) 8
  • Le pur sentiment d'exister

    Lorsque quelqu'un renonce à se préoccuper de sa sensorialité, de sa corporéité, de ses humeurs et du langage, ce qu'il éprouve est le pur sentiment d'exister, parce que l'existence n'est plus enchaînée à telle ou telle forme de relation ou à telle situation particulière. La certitude d'être vivant en tant que telle est d'une si pleine évidence qu'elle rejette dans l'ombre toutes les modalités que la vie individuelle est susceptible de revêtir.

    Couverture de Jamais contre, d’abord
    page(s) 134 (La fin de la plainte)
  • Comment l'on n'est pas

    On tente toujours de s'adonner à une activité avec soi-même, plutôt que d'être simplement avec soi-même. Or, si on ne peut pas être avec soi-même, on ne peut pas découvrir qui on est ni où on se trouve. Dès lors, il est impossible de trouver l'essence de ce qu'on est.

    Mais il y a plus : trouver aussi comment on n'est pas, pourquoi on n'est pas, où l'on n'est pas. Essentiellement, ce qu'on découvre c'est qu'on est « inexistant » en ce moment. En essayant de trouver qui on est, on découvrira peut-être qu'on n'est rien du tout. Cela dit, même si l'on découvre qu'on n'est pas, on découvre que, malgré tout, une sorte de brillance radieuse existe dans l'expérience même de l'inexistence.

    Couverture de Sourire à la peur
    page(s) 26
  • L'existence pure

    Lorsque l'être est paisible, il scintille comme la fleur d'eau à la surface du lac et ce scintillement est perçu subtilement par ceux qui l'entourent. Il les apaise et il les attire à soi. Lorsque l'être se repose dans sa puissance intérieure, calme et détendu, faisant l'expérience de l'existence pure, il rassure son environnement et il trouve dans cette dégustation nombre de réponses.

    Couverture de Le meilleur de soi
    page(s) 292
  • Jouissance de la conscience d'exister

    [P]ure existence, pure conscience et pure jouissance de la conscience d'exister. Cela nourrit l'essentiel comme rien d'autre ne saura le faire. En réalité, ça répond à l'angoisse existentielle en réparant de l'intérieur le sentiment d'unité perdue ou que l'on croyait telle.

    Couverture de Le meilleur de soi
    page(s) 222
  • Plus de combat

    Le mieux que j'ai à faire pour interrompre ce mécanisme de « saisie » est de me dire que ce que je cherche est déjà là : il suffit que je m'ouvre pour le savourer. Alors, je déguste une paix intérieure, une sorte de liberté où plus rien ne me contraint. Je goûte vide et plénitude à la fois. Je savoure en même temps une sorte de communion avec ce que je suis et ce qui m'entoure. Il n'y a plus de combat. Je me repose profondément. Je ne demande rien. Je suis, tout simplement. J'existe.

    Des pensées surviennent, des intuitions, des obsessions récurrentes. Mais, à la longue, je me suis rendu compte qu'elles n'avaient pas le pouvoir que je leur prêtais au départ. Si je les laisse passer sans m'accrocher, elles perdent leur aspect contraignant. Elles deviennent une sorte de bruit de fond dont je n'ai pas à m'occuper. Je ramène constamment mon attention à la sensation de bien-être. Je ne combats pas mes pensées, j'en ajoute une : celle de retourner à un état de disponibilité.

    Couverture de Le meilleur de soi
    page(s) 210