KarlFried Graf Dürckheim

Portrait de KarlFried Graf Dürckheim

Karl Friedrich Graf Eckbrecht von Dürckheim-Montmartin (1896-1988) a connu une enfance dorée. Jeune adulte, après l'expérience terrifiante de la Première guerre mondiale, il a fait des études de philosophie et de psychologie. Il s'est intéressé autant à la mystique rhénane qu'au bouddhisme et au taoïsme.

En 1937, le pouvoir nazi l'éloigne en lui confiant une mission culturelle au Japon où il découvre avec émerveillement la culture zen (méditation assise, cérémonie du thé, tir à l'arc) de « l'intuition comme la voie d'accès directe à la vérité ».

De retour en Allemagne en 1947, il fonde à Rütte, en Forêt-Noire, un centre de retraites de « thérapie initiatique » qui compose méditation, travail du corps (lâcher le « corps que l'on a » au profit du « corps que l'on est »), psychologie des profondeurs et expression artistique. « Une voie d'expérience et d'exercice de l'être » qu'il a proposé à ses hôtes retraitants pendant les trente-cinq ans dernières années de sa vie.

Lignée Karlfried Graf Dürckheim

 

Quelques ouvrages

Quelques extraits

• Devenir transparent au contact du réel

[L]es exercices propres à la pratique du Zen ont pour fondement un principe de dignité humaine dont la justesse n'est plus contestée : l'homme a reçu le pouvoir et le devoir, à partir de certaines expériences et perceptions, ainsi qu'à l'aide de certains exercices, de se libérer du règne de la conscience statique du moi qui nous sépare de l'Être, de s'ouvrir à une dimension plus profonde, au Réel. Il peut et il doit devenir transparent à son contact, c'est-à-dire perméable à l'être essentiel qui est en lui.

page(s) 9
• S’enraciner solidement pour s’épanouir

De même que la cime de l'arbre ne s'épanouit pleinement que si celui-ci est solidement enraciné, de même l'esprit ne se développe dans sa vraie mesure que s'il ne renie pas ses racines, c'est-à-dire s'il conserve constamment en lui le sentiment de l'unité originelle de la vie, de cette unité dont la vie humaine, comme toute chose, est issue. Mais que l'homme perde le contact avec cette vie originelle par une tension exagérée vers le haut et il dérange l'équilibre de ses forces ; le Moi, imbu de son importance, lui cache la voie vers le développement de son être profond alors que sa véritable destination est de préparer et de protéger cette voie.

page(s) 16
• Un invisible élevé à l’état de mystère

Le mot de Novalis : « Tout visible est un invisible élevé à l’état de mystère » a pris et continue à prendre, une portée de plus en plus grande à mes yeux dans un travail de caractère initiatique. Il concerne l'éveil du « sens intérieur ». Celui qui se perçoit en son Être essentiel est aussi touché, à travers toutes les apparences, par celui des choses.

page(s) 21
• Vie et mort d'une feuille

La vision orientale de la vie inclut la mort. Peut-être l'image de la relation entre la feuille et l'arbre éclaire-t-elle ce point de vue. Si la petite feuille, attachée à l'arbre, avait une conscience individuelle limitant son sentiment de la vie au simple état de feuille, elle subirait une vie réduite au temps de sa propre existence. La mort automnale signifierait pour elle l'anéantissement et s'opposerait à sa perception de la vie. Rien d'étonnant alors si cette feuille s'efforce de jouir au maximum de sa brève existence de feuille, de se protéger contre l'automne et l'hiver et d'oublier sa peur de la mort dans le rêve chimérique d'un éternel état de feuille.

Mais la petite feuille ne pourrait-elle pas, par une conscience de soi plus profonde, percevoir son être de feuille comme une modalité de l'arbre et vivre son être d'arbre ? Ne serait-elle pas plus près de sa « réalité » si sa conscience de la vie devenait une avec celle de l'arbre, dont la grande vie produit sa petite existence, lui survit et contient aussi sa mort de feuille ?

page(s) 17
• Traversée du mal-être

C'est seulement par la souffrance résultant de tout ce qui empêche la présence de l'Être que l'homme apprend à se rendre compte de ce qui est faux. Seule la souffrance le mûrit et le rend disponible pour sentir, un beau jour, son Être authentique, et pour comprendre ce vers quoi Il nous pousse.

page(s) 21
• Le véritable centre fait défaut

« Poitrine en avant – ventre rentré », c'est l'expression la plus concise d'une mauvaise attitude fondamentale de l'homme, ou plus précisément d'une mauvaise attitude physique qui trahit et renforce une mauvaise attitude intérieure. […]

Le déplacement du centre de gravité « vers le haut » et le fait d'être coupé de ce centre dérangent l'équilibre naturel entre tension et relâchement et font osciller l'homme entre un état de tension très forte et un état de dissolution. Mais en quoi cela peut-il constituer un « danger pour un peuple » ? Par cette fausse attitude qui exprime et renforce une ordonnance apparente des forces intérieures et qui fait obstacle à la vraie ordonnance, car là où tout est décentré vers le haut, le véritable centre fait défaut.

page(s) 15
• Ce qui éclôt par le silence et par lui seul

Le résultat surnaturel compte plus que bienfait naturel. L'important est de garder et de développer le sens intérieur grâce auquel nous percevons ce qui éclôt par le silence et par lui seul.

page(s) 14
• L'attitude prométhéenne de l'Occident

L'Orient reconnaît bien la supériorité de la civilisation technique occidentale mais, à ses yeux, la surestimation du rationalisme et de la puissance technique, qui refoule dans l'ombre la culture de l'humain en soi, est le signe d'une relation fruste, rudimentaire et immature avec la vie et la mort. Il y voit un blocage dans une attitude prométhéenne qui convient peut-être à un adolescent mais ne s'accorde guère avec la maturité.

page(s) 15
• Guérison véritable

Certains thérapeutes considèrent […] comme guéri un homme débarrassé de troubles manifestes, qui se sent heureux de vivre, efficace et capable de contacts satisfaisants avec le monde. Pour d'autres thérapeutes, la guérison ne sera réelle que si le sujet a vraiment retrouvé le chemin de son Être essentiel, c'est-à-dire la manière dont l'Être surnaturel est présent en lui et tend à prendre forme en ce monde. Seul est en bonne santé donc l'homme qui, en tant que personne, est devenu transparent à son Être essentiel. En lui-même il a trouvé le sens de sa vie, la source inépuisable de guérison et de transformation, celle qui jaillit même au sein de la souffrance.

page(s) 12