doute

Extraits étiquetés avec : doute

  • Ni vérité révélée, ni écriture sainte, ni dogme, ni sauveur

    Il convient de garder une saine distance, un doute positif, à l'égard des enseignements que nous recevons, quelle que soit l'autorité en la matière, la personne qui incarne le maître, y compris le Bouddha, jusqu'à ce que la validité de l'enseignement nous soit clairement confirmée par l'investigation, l'analyse et l'expérience. […] Il n'y a ni vérité révélée, ni écriture sainte, ni dogme, ni sauveur.

    Couverture de C.G. Jung et la sagesse tibétaine
    page(s) 19-20
  • Le Bouddha engage à douter et vérifier par soi-même

    [Le Bouddha] ne réclamait pas […] pour lui une autorité spéciale à cause de son enseignement – ni à cause de la foi qu'avaient en lui les gens, ni à cause de la logique manifeste de ce qu'il enseignait. Au contraire, il affirmait que douter de ce dont nous n'avons pas connaissance par expérience personnelle et le vérifier est approprié […]

    La plus haute autorité est notre propre expérience de la vérité. Rien ne devrait être accepté par simple foi  : nous devons l'examiner pour voir si c'est logique, pratique, bénéfique. Il ne suffit pas non plus, ayant examiné un enseignement par la raison, de l'accepter intellectuellement comme vrai. Si la vérité doit nous être bénéfique, il nous faut en faire l'expérience directe. Alors seulement, pourrons-nous savoir si l'affirmation est réellement vraie.

    Couverture de L’art de vivre
    page(s) 31-32
  • Les cinq premiers liens

    Le bouddhisme envisage Dix liens qui attachent à l'existence. Les cinq premiers enferment dans le monde grossier que nous connaissons. L'anāgāmi s'en est complètement libéré. Les cinq suivants, subtils, attachent aux mondes divins dont le sage doit aussi se dégager pour atteindre le nirvāna.

    Le premier lien défait par la pratique de la Voie est la croyance à l'ego en tant qu'être autonome, individuel et séparé de tous les êtres. En dehors de tout concept métaphysique propre au bouddhisme, on voit facilement que ce lien ou cette croyance, noué par l'orgueil et l'égoïsme, nourrit l'indéfinie variété des souffrances égocentriques, des plus grossières aux plus subtiles. Elles passent toutes par les nœuds émotionnels qu'entretient l'enfermement dans le moi empirique, solidifié et hypostasié. Ignorer ce lien empêche toute réalisation spirituelle ultime. À l'inverse, les personnes réalisées donnent toutes une impression de transparence, due à l'effacement de leur individualité derrière la Loi transcendante qui œuvre à travers eux. Cet effacement, celui de la mort au moi, est identique à ce que l'on appelle mort du « vieil homme » dans le langage de la mystique chrétienne.

    Vient ensuite le doute sceptique. Ce deuxième lien se caractérise par l'attitude méfiante à l'égard de l'enseignement traditionnel, qui empêche de s'engager vigoureusement à en expérimenter le contenu, et s'abrite derrière les rationalisations les plus diverses. Ce manque de foi en autrui est évidemment corrélatif d'un manque de confiance en soi et en sa propre capacité à entreprendre avec succès. Il y a là une dévalorisation, masochiste dirait un psychiatre, qui empêche de découvrir la présence de la divinité au centre du cœur. Cet obstacle empêche radicalement tout engagement spirituel sérieux. Il est surmonté par l'attitude évangélique qui consiste à chercher, frapper et demander.

    L'attachement aux rites et règles éthiques présente le troisième lien à défaire. Cet énoncé peut sembler paradoxal. Il ne s'agit pas d'un refus des rites ou de la morale, indispensables, mais de reconnaître leur valeur relative, et qu'à un certain stade, s'y attacher devient un obstacle conduisant au ritualisme, à la sclérose, à l'intégrisme. La maturité spirituelle suppose que l'initié peut dépasser  la fixation craintive à ce qui est bon et efficace, pour aller plus loin. Il faut découvrir la relativité des critiques du bien et du mal par rapport à la vérité. Seule la vérité rend libre : « Vous connaîtrez la vérité et la vérité fera de vous des hommes libres » (Jean 8, 32). Cela suppose un dépassement du dualisme vers le principe transcendant, où les contraires deviennent complémentaires. Le bouddhisme insiste beaucoup sur la primauté de cette connaissance transcendante. Le christianisme également : « La cause universelle ne se manifeste à découvert et véritablement qu'à ceux-là seuls qui vont au-delà de toute consécration rituelle et de toute purification », écrit Denys l'Aéropagite, l'un des maîtres à penser de  saint Thomas d'Aquin.

    L'avidité sensuelle est le quatrième lien. Il se retrouve à tous les niveaux, de plus grossier (alimentaire, sexualité seulement sensuelle), au plus subtil (musique, poésie, jeux intellectuels). L'attachement sensuel gouverne notre monde. Éros est très séduisant. Le problème n'est pas de lui couper les ailes, son activité étant nécessaire, mais de se libérer de l'attachement au désir, ou encore du désir du désir, cette complication mentale permanente qui survit à la satisfaction du besoin. Une longue pratique, méditative et dans l'action, s'avère nécessaire. Il faut expérimenter par soi-même que les joies de la réalisation spirituelle transcendent les jouissances sensuelles, ce qui ne supprime pas ces dernières.

    Il reste la malveillance ou l'agressivité. Il est indispensable de dépister puis de couper ce lien, qui nous pousse à haïr et détruire, tout ce qui semble contrarier ou menacer le moi, lui nuire ou lui déplaire. Et cela tant dans nos manifestations conscientes que dans nos déterminations inconscientes décelables dans nos actes manqués ou nos rêves. La haine vient d'une réaction de défense puérile devant une menace, ou ce qui est ressenti comme tel par notre faiblesse postulée inconsciemment. L'homme sûr de sa force interne ne hait pas. Bien entendu, il ne se prive pas d'écarter ce qui peut, réellement, lui nuire.

    Couverture de Itinéraire d’un bouddhiste occidental
    page(s) 45-48
  • L’effacement

    Face au questionnement métaphysique, le Bouddha demeure sans parti pris car la sagesse adapte sa réponse pour aider l'esprit qui questionne à s'extraire du doute négatif, de l'opacité et de la torpeur. L'attitude sans parti pris consiste à ne s'attacher à aucune position intellectuelle, à demeurer sans position arrêtée, à ne rien figer dans des représentations mentales, pour ne pas se laisser posséder par des idées et manipuler par le mental discursif. Ainsi permet-elle de se soustraire aux querelles stériles et aux bavardages. Aucune idée n'est privilégiée au détriment des autres. Aucune idée n'est posée comme définitive. Cette attitude est aussi une expression de non-violence fondamentale et d'amour infini. Le Bouddha n'impose rien et ne s'impose pas. Il s’efface.

    Couverture de Le grand livre du bouddhisme
    page(s) 503-504