Alexandre Jollien

Portrait d'Alexandre Jollien

Alexandre Jollien (né en 1975) est un philosophe suisse, né infirme moteur cérébral, qui a vécu jusqu'à l'âge de vingt ans dans une institution spécialisée pour handicapés. La vie s'annonce pour lui selon ses propres termes comme un « parcours du combattant », ce qui ne l'empêche pas de poursuivre ses études et de fonder une famille.

Il conjugue sa foi chrétienne avec la pratique de la méditation zen. Ses livres récents, où il témoigne avec beaucoup de simplicité, sans se dissimuler, de la manière dont il approfondit les enseignements des deux traditions, sont bouleversants d'humanité.

Contributions dans

Quelques ouvrages

Quelques extraits

• La gratitude

Autant considérer la santé des enfants, notre propre santé, nos amis, comme des cadeaux immenses et non comme un dû. En somme, la gratitude, c'est revisiter tout ce que l'on reçoit avec une liberté nouvelle et en profiter encore plus, sans s'accrocher, sans s'agripper.

page(s) 77
• Se libérer de soi

Dans la spiritualité, je crois qu'il n'y a pas de voie toute tracée, encore moins de mode d'emploi. Il y a juste une ascèse quotidienne, c'est-à-dire des exercices que l'on pratique pour se libérer de soi, des images que l'on a de soi, des jugements dans lesquels on enferme la réalité.

page(s) 14
• Le saut fatidique

[L]e saut fatidique : perdre un à un nos conditionnements, mourir chaque jour à nous-mêmes et nous donner toujours plus intensément.

page(s) 13
• Sois qui tu es

« Détendez-vous », « Soyez zen »… Mais la détente, […] plus on la cherche, moins on l'atteint. La détente, c'est être véritablement ce que nous sommes au fond du fond. En la cherchant, on en fait au contraire un objet. Dans la tradition zen, on dit que le zazen est une méditation sans objet.

page(s) 53-54
• Vivre le mal-être à fond

Je pense que la souffrance, la tristesse ont leur place en nous. Elles durent peut-être précisément parce que l'on n'ose pas les vivre à fond. Ce qui me frappe en observant les enfants, c'est que lorsqu'ils pleurent, ils pleurent à fond, et leur tristesse s'en va. Peut-être qu'il y a des blessures d'enfance qui n'ont pas pu être vécues à fond, et qui pour cette raison demeurent.

page(s) 17
• Se jeter tout entier dans l'action

Cesser de se regarder, pour se jeter tout entier dans l'action. Sous la douche, apprécier l'eau qui coule avec reconnaissance. Nettoyer ce corps avec gratitude. Rien n'est banal.

page(s) 25
• Se contenter d'être

Sur certaines autoroutes françaises, j'ai lu l'injonction : Restez zen. Pour moi, le zen, c'est se contenter d'être. Il ne s'agit pas d'essayer d'être quoi que ce soit. Alors essayer d'être zen, c'est déjà un très mauvais départ.

page(s) 112
• Départ biaisé sur la voie

Il semble que nous prenions souvent un départ biaisé sur une voie spirituelle. Les aspirations qui nous guident sont complètement narcissiques. On pratique le zen pour avoir un superego, un ego indolore, pour être au-delà de la souffrance. Mais de l'autre, nous n'avons pas grand-chose à faire.

page(s) 97
• En paix avec ses blessures

Le désir aliéné voudrait que l'on progresse une fois pour toutes, que l'on guérisse de toutes nos blessures intérieures. Mais la chose est sans doute radicalement impossible. Ce qui nous sauve, c'est de savoir que l'on ne peut pas guérir de ses blessures mais que l'on peut vivre avec, que l'on peut cohabiter avec elles sans qu'il y ait nécessairement de l'amertume.

page(s) 61
• Lâcher les représentations mentales

Se débarrasser de toutes les représentations mentales dont on recouvre les choses, les êtres et nous-mêmes en fin de compte. Nous avons une image de nous et, du matin au soir, nous voulons nous y conformer.

page(s) 44
• Écouter l'autre sans le juger

Il ne s'agit bien entendu pas de figer « l'ami dans le bien » dans une définition. Mais ce qui me semble le caractériser, c'est le non-jugement. Les textes zen emploient l'image du miroir vide à ce propos. Force est de constater que la chose la plus difficile, en tous cas à mes yeux, est d'écouter l'autre sans le juger.

page(s) 23
• Accueillir ce qui est

Apprendre à ne plus refuser le réel, à accueillir ce qui est, sans résister, sans lutter sans cesse, cette fâcheuse tendance qui me mène à l'épuisement.

page(s) 11
• La simplicité est difficile

Il est compliqué d'être simple.Il est compliqué de rester nu face à la vie. Tout se passe comme si notre mental travaillait du matin au soir à la compliquer, à comparer, à attendre des circonstances qui n'arriveront jamais, à regretter un passé qui est passé pour toujours. Mener une vie simple, c'est s'abandonner à tout. Il ne s'agit même pas de vouloir faire disparaître ses regrets. Si les regrets sont là, pas de problème, ils ont leur place.

page(s) 108
• L'heure de méditation

Ce qui m'aide, c'est la pratique d'une heure de méditation par jour. Pendant cette heure-là, je regarde passer les idées telles qu'elles se présentent en mon esprit sans refuser ni m'agripper à aucune d'elles.

page(s) 94
• L’esprit chasseur qui court toujours après sa proie

[D]'abord nous libérer peu à peu de cet esprit guerrier, chasseur qui court toujours après sa proie – des objectifs, un idéal… – qui nous empêche de savourer la vie avec ses imperfections et ses miracles quotidiens. Comment goûter au véritable repos si nous sommes perpétuellement en quête d'autre chose, le bonheur, une sagesse préfabriquée, un bien-être clé en main, une carrière conforme à un modèle façonné par la crainte, la comparaison et quelques troubles désirs ?

page(s) 10
• La prétention ruine l'humilité

Ce qui contrarie le plus l'humilité ce n'est pas la connaissance de ses compétences, ni de ses talents comme dit l'Évangile, mais c'est la prétention. Quand je prétends maîtriser la vie, ou vouloir changer l'autre, je m'éloigne de la terre.

page(s) 86
• Laisser être

Au lieu de m'éreinter à tout gérer, laisser être.

page(s) 29
• Laisser vivre l'émotion

Je laisse venir l'émotion, puis se développer et s'évanouir d'elle-même.

page(s) 41
• Les pensées comme oiseaux

[L]'exercice de la méditation consiste à voir la vacuité, à se laisser totalement détendre dans la vacuité. À considérer les pensées comme des oiseaux. Et derrière les oiseaux, il y a un ciel toujours immensément bleu.

page(s) 95
• Danser avec le tragique

Je crois que la détermination, c'est conjuguer l'abandon et une infinie confiance en la vie. Qu'est-ce que je peux faire pour me protéger de la vie ? Absolument rien. Et pourtant, jour après jour, j'essaie de construire des boucliers et des façades qui me protégeraient du tragique de l'existence. La dimension tragique de l'existence fait partie de la vie. Quand on l'a compris du fond de son être, on peut danser avec ce tragique sans se crisper.

page(s) 60-61