Alexandre Jollien

Portrait d'Alexandre Jollien

Alexandre Jollien (né en 1975) est un philosophe suisse, né infirme moteur cérébral, qui a vécu jusqu'à l'âge de vingt ans dans une institution spécialisée pour handicapés. La vie s'annonce pour lui selon ses propres termes comme un « parcours du combattant », ce qui ne l'empêche pas de poursuivre ses études et de fonder une famille.

Il conjugue sa foi chrétienne avec la pratique de la méditation zen. Ses livres récents, où il témoigne avec beaucoup de simplicité, sans se dissimuler, de la manière dont il approfondit les enseignements des deux traditions, sont bouleversants d'humanité.

Contributions dans

Quelques ouvrages

Quelques extraits

• Danser avec le tragique

Je crois que la détermination, c'est conjuguer l'abandon et une infinie confiance en la vie. Qu'est-ce que je peux faire pour me protéger de la vie ? Absolument rien. Et pourtant, jour après jour, j'essaie de construire des boucliers et des façades qui me protégeraient du tragique de l'existence. La dimension tragique de l'existence fait partie de la vie. Quand on l'a compris du fond de son être, on peut danser avec ce tragique sans se crisper.

page(s) 60-61
• Liberté intérieure

L'une des voies vers la liberté intérieure n'est pas à trouver dans l'affirmation de soi, comme on l'entend trop souvent, mais juste dans le fait d'être là. Juste être soi, ni plus ni moins, et être ouvert à l'autre.

page(s) 101
• Laisser être

Au lieu de m'éreinter à tout gérer, laisser être.

page(s) 29
• Rester dans le flux

« Dès que l'on s'arrête sur une pensée, le flux de pensées s'arrête aussi immédiatement et cela se nomme attachement. » Fa-hai. Le Sūtra de l'Estrade du Sixième Patriarche Houei-neng

page(s) 112
• Départ biaisé sur la voie

Il semble que nous prenions souvent un départ biaisé sur une voie spirituelle. Les aspirations qui nous guident sont complètement narcissiques. On pratique le zen pour avoir un superego, un ego indolore, pour être au-delà de la souffrance. Mais de l'autre, nous n'avons pas grand-chose à faire.

page(s) 97
• Sois qui tu es

« Détendez-vous », « Soyez zen »… Mais la détente, […] plus on la cherche, moins on l'atteint. La détente, c'est être véritablement ce que nous sommes au fond du fond. En la cherchant, on en fait au contraire un objet. Dans la tradition zen, on dit que le zazen est une méditation sans objet.

page(s) 53-54
• Écouter l'autre sans le juger

Il ne s'agit bien entendu pas de figer « l'ami dans le bien » dans une définition. Mais ce qui me semble le caractériser, c'est le non-jugement. Les textes zen emploient l'image du miroir vide à ce propos. Force est de constater que la chose la plus difficile, en tous cas à mes yeux, est d'écouter l'autre sans le juger.

page(s) 23
• La simplicité est difficile

Il est compliqué d'être simple.Il est compliqué de rester nu face à la vie. Tout se passe comme si notre mental travaillait du matin au soir à la compliquer, à comparer, à attendre des circonstances qui n'arriveront jamais, à regretter un passé qui est passé pour toujours. Mener une vie simple, c'est s'abandonner à tout. Il ne s'agit même pas de vouloir faire disparaître ses regrets. Si les regrets sont là, pas de problème, ils ont leur place.

page(s) 108
• Les pensées comme oiseaux

[L]'exercice de la méditation consiste à voir la vacuité, à se laisser totalement détendre dans la vacuité. À considérer les pensées comme des oiseaux. Et derrière les oiseaux, il y a un ciel toujours immensément bleu.

page(s) 95
• Il n'y a rien à accepter

[I]l n'y a rien à accepter. Accepter, implique un moi qui accepte. Or le moi n'a rien à faire dans l'histoire. J'ai compris un jour que le moi est programmé pour refuser. Il s'agit donc davantage de « laisser être » que d'accepter. Accepter, c'est encore du travail pour le moi.

page(s) 18
• Se laisser renouveler par l'instant

Le problème n'est pas tant que tout passe mais que je ne sais pas laisser passer. Le diagnostic est édifiant : tout est vanité, chaque moment de l'existence tient de l'éphémère. Et plus je m'accroche, plus je morfle.

D'où l'exercice capital : oser la non-fixation, ne pas s'agripper au passé, mais se donner corps et âme à l'instant, se laisser renouveler par lui.

page(s) 21
• La prétention ruine l'humilité

Ce qui contrarie le plus l'humilité ce n'est pas la connaissance de ses compétences, ni de ses talents comme dit l'Évangile, mais c'est la prétention. Quand je prétends maîtriser la vie, ou vouloir changer l'autre, je m'éloigne de la terre.

page(s) 86
• Ce n'est pas compliqué

Ne pas compliquer les choses. Ne rien surajouter quand les difficultés apparaissent. Sans les nier, il s'agit de retourner au réel, de voir que l'imaginaire, comme un cheval, s'emballe et empire la situation.

« Ce n'est pas compliqué », c'est finalement revenir à l'immédiat, au réel. Qu'est-ce qui se passe ?

page(s) 35
• Se contenter d'être

Sur certaines autoroutes françaises, j'ai lu l'injonction : Restez zen. Pour moi, le zen, c'est se contenter d'être. Il ne s'agit pas d'essayer d'être quoi que ce soit. Alors essayer d'être zen, c'est déjà un très mauvais départ.

page(s) 112
• Vivre le mal-être à fond

Je pense que la souffrance, la tristesse ont leur place en nous. Elles durent peut-être précisément parce que l'on n'ose pas les vivre à fond. Ce qui me frappe en observant les enfants, c'est que lorsqu'ils pleurent, ils pleurent à fond, et leur tristesse s'en va. Peut-être qu'il y a des blessures d'enfance qui n'ont pas pu être vécues à fond, et qui pour cette raison demeurent.

page(s) 17
• Se jeter tout entier dans l'action

Cesser de se regarder, pour se jeter tout entier dans l'action. Sous la douche, apprécier l'eau qui coule avec reconnaissance. Nettoyer ce corps avec gratitude. Rien n'est banal.

page(s) 25
• L'heure de méditation

Ce qui m'aide, c'est la pratique d'une heure de méditation par jour. Pendant cette heure-là, je regarde passer les idées telles qu'elles se présentent en mon esprit sans refuser ni m'agripper à aucune d'elles.

page(s) 94
• La gratitude

Autant considérer la santé des enfants, notre propre santé, nos amis, comme des cadeaux immenses et non comme un dû. En somme, la gratitude, c'est revisiter tout ce que l'on reçoit avec une liberté nouvelle et en profiter encore plus, sans s'accrocher, sans s'agripper.

page(s) 77
• Suffisance, auto-dénigrement, humilité

Le suffisant et celui qui se dénigre sont loin de l'humilité. Le premier se coupe du monde en ne comptant que sur lui-même. Le second se coupe de lui-même en ne comptant que sur les autres.

page(s) 87
• Lâcher les représentations mentales

Se débarrasser de toutes les représentations mentales dont on recouvre les choses, les êtres et nous-mêmes en fin de compte. Nous avons une image de nous et, du matin au soir, nous voulons nous y conformer.

page(s) 44