vacuité

Extraits étiquetés avec : vacuité

  • Quatre questions

    Au terme d'une session zen, un ami bouddhiste venait de m'expliquer que le non-attachement (anātman), la vacuité (śūnyatā) et l'attention à l'instant « sans but ni profit » étaient pour lui l'essentiel de ce que lui avaient enseigné la posture et la méditation zen. Il me posa quatre questions :

    • Un chrétien peut-il être sans attachement, sans désir, sans dépendance, à l'égard même de Dieu et du Christ ?

    • Un chrétien peut-il accepter la non-réalité du sujet ?

    • Un chrétien peut-il faire sienne l'expérience de la réalité ultime comme vacuité ?

    • Un chrétien peut-il vivre dans la discontinuité, instant après instant, sans mémoire, sans projet ?

    En guise de réponse, j'invitai mon ami à venir pratiquer une semaine de méditation hésychaste dans un monastère orthodoxe, après lui avoir expliqué que la liberté intérieure, le don de soi-même (ou le renoncement à soi-même), le sens du mystère, « ne pas se préoccuper du lendemain » et « ne pas se retourner en arrière » étaient pour moi des éléments importants enseignés par la pratique de la méditation hésychaste. Je lui posai quatre questions :

    • Un bouddhiste peut-il être libre de toutes attaches, sans désir, même à l'égard du dharma et du bouddha ?

    • Un bouddhiste peut-il accepter la réalité relative du sujet humain (et renoncer à ce qu'il croit être un soi ou un non-soi) ?

    • Un bouddhiste peut-il faire sienne l'expérience de la réalité ultime comme plénitude (pléroma) ou comme Mystère (ténèbre supra-lumineuse, dirait Denys le Théologien) ?

    • Un bouddhiste peut-il vivre l'instant dans l'histoire, sans nier pour autant son ouverture à l'Éternel (qui est un non-temps) ?
    Couverture de La montagne dans l’océan
    page(s) 14-15
  • Un être qui ne cesse d’apparaître

    L'impermanence elle-même est la nature de bouddha.

    Seule l'impermanence est immuable.

    Le moment présent transcende complètement l'avant et l'après.

    Un moment n'est rien d'autre qu'un être qui ne cesse d’apparaître.

    Le moment auquel vous vous attachez n'est déjà plus que l'idée que vous vous faites du moment. Le moment réel est constamment en action, il surgit, il disparaît, il apparaît. Dans le bouddhisme, c'est ce qu'on appelle le vide.

    La nature originelle de la conscience humaine est exactement comme une chute d'eau, sereine et tranquille en même temps que dynamique.

     

    Couverture de Ma vie dans les monts
    page(s) 39-40
  • Le bouddhisme perçu comme nihilisme

    [L]e néant bouddhique selon Hegel n'est pas encore, comme il le deviendra par la suite, le contraire de l'être, mais l'absolu, libre de toute détermination. Ce qui s'anéantit dans le passage à l'absolu, c'est donc l'individualité relative, conditionnée ; mais le vide qui en résulte n'est pas rien, ce n'est qu'un autre nom pour la plénitude. […]

    [À la suite des héritiers de Hegel, Eugène Burnouf, Jules Barthélémy Saint-Hilaire], on en vient à parler du Bouddha comme du « grand Christ du vide » (Edgar Quinet), et du bouddhisme comme d'une « Église du nihilisme » (Ernest Renan). […]

    Deux erreurs accréditent la thèse nihiliste : erreur quant au but, le nirvāna proprement dit, dont on interprète la nature transcendantale, située au-delà de toutes les formulations possibles, comme une simple inexistence ou annihilation ; erreur quant à la méthode dialectique de l'école du Madhyamaka (« Voie du Milieu »), qui procède par négation sans s'arrêter à la négation, et évacue toutes les notions, même celle de la vacuité. Cela signifie simplement qu'on ne peut rien dire de la réalité qui ne soit déjà une idée reçue, non que la réalité n'existe pas, en deçà ou au-delà de tout ce qu'on peut en dire.

    Couverture de Le bouddhisme
    page(s) 30-31
  • Vacuité et réel sont un

    [T]ous les dharma sont vides, car nous utilisons la notion de vacuité ou d'espace pour détruire la croyance en une réalité absolue, et nous utilisons ensuite la beauté infinie de la réalité pour détruire la notion d'un vide absolu. C'est la raison pour laquelle je préfère le mot « espace », car il pose clairement le fait que la vacuité et le réel sont un.

    Couverture de Chan & zen
    page(s) 26
  • L’éveil est transmissible sur le champ

    Pour le tantrisme, l'éveil est transmissible sur le champ. Il est la vérité de notre propre esprit. Devant l'arbre empoisonné de notre confusion, et de notre égocentrisme, trois choix s'offrent à nous.

    Nous pouvons, grâce à la discipline la plus vigilante, couper un à un les fruits porteurs de mort de cet arbre. C'est un travail minutieux et long.

    Nous pouvons aussi, par la vision claire de la vacuité de toute chose et par compassion, déraciner l'arbre, c'est-à-dire couper l'attachement qui engendre la confusion. C'est un geste plus radical – celui propre au Grand Véhicule (Mahāyāna).

    Le Tantra, lui, invite à manger les fruits empoisonnés et à les transmuter aussitôt en élixir de vie. Le Tantra est est une alchimie spirituelle transformant le plomb de l'affliction en or pur de la félicité. Pour lui, les deux approches précédentes sont marquées par un manque de confiance dans l'esprit du Bouddha. Elles sont dualistes et non dénuées d'une forme subtile de violence, car elles cherchent à rejeter la confusion pour atteindre l'éveil.

    Couverture de 50 fiches pour comprendre le bouddhisme
    page(s) 25
  • Notre corps ne nous appartient pas

    Dans la vie moderne, les gens pensent que leur corps leur appartient et qu'ils peuvent en faire tout ce qu'ils veulent. « Nous avons le droit de vivre comme nous l'entendons. » La loi vous soutient dans de telle déclarations. C'est l'une des manifestations de l'individualisme.

    Mais, selon l'enseignement du vide, votre corps n'est pas seulement à vous : il appartient également à vos ancêtres, à vos parents et aux générations futures. Et il appartient aussi à la société et à tous les êtres vivants, qui ont tous contribué à rendre possible la présence de ce corps : les arbres, les nuages, tout. Garder votre corps en bonne santé est la meilleure façon d'exprimer vote gratitude à l'univers tout entier et à vos ancêtres, et aussi de ne pas trahir les générations futures.

    Couverture de Changer l’avenir
    page(s) 88
  • Ni perception, ni non-perception

    — Moine Siddharta Gautama, dans l'état de non-matérialité, la vacuité n'est ni l'espace vide ni ce que l'on appelle la conscience. Tout ce qui reste est encore du domaine de la perception. Or, le chemin de la libération consiste à transcender toute perception.

    — Maître, si on élimine la perception, que reste-t-il ? Qu'est-ce qui nous distingue alors d'un morceau de bois ou d'un rocher ?

    — Un morceau de bois ou un rocher n'existent pas sans la présence d'une perception extérieure. Les objets inanimés sont eux-mêmes des projections de l'esprit. Vous devez atteindre un niveau de conscience dans lequel les notions de perception et de non-perception n'existent plus.

    Couverture de Sur les traces de Siddharta
    page(s) 86
  • Continuité de la pureté primordiale de l'esprit

    [L]e mot « tantra » désigne un processus ininterrompu et sans origine : la continuité de la pureté primordiale de l'esprit. Que l'esprit vive un moment de calme, une émotion vive ou un état régi par le mouvement des pensées, sa pureté naturelle n'est jamais altérée. L'état de calme correspond à la manifestation de la vacuité ; l'état régi par le mouvement des pensées correspond à la manifestation de la clarté ininterrompue. La continuité souligne également l'inséparabilité de ces deux aspects, pure vacuité et clarté essentielle.

    La notion de « toile » permet de comprendre que toutes nos expériences, des plus simples aux plus complexes, se déroulent dans un contexte unifié. L'univers matériel nous en fournit une image significative au travers des réseaux indivisibles de relations qui garantissent l'harmonie du monde vivant.

    Dans cette perspective, la notion de continuité est une amplification de l'interdépendance. Pour les tantra, l'interdépendance s'exprime de manière dynamique et énergétique sous la forme d'interconnexions qui révèlent l'indissociabilité des expériences habituelles et des expériences éveillées. Au niveau ultime, il n'est pas de distinction. La texture de la réalité reste inchangée dans le saṃsāra comme dans le nirvāna. Cela revient à dire que la nature de bouddha est déjà présente dans notre expérience actuelle quelque soit notre degré de confusion ou de compréhension.

    Couverture de Le grand livre du bouddhisme
    page(s) 198-199
  • Expérimenter sur le champ

    Chögyam Trungpa désarçonne […] son lecteur en ouvrant la possibilité d'une entente non orientée par un sens immédiatement logique, ou tout au moins correspondant à notre conception habituelle de la logique.

    Fidèle à l'enseignement ultime de la tradition bouddhique, Chögyam Trungpa tente de susciter chez son lecteur une expérience au-delà de tous ses points de repère habituels. Chögyam Trungpa ne parle pas du principe féminin, mais nous fait résonner la fertilité de l'espace inconditionnel ; il ne présente pas ce qu'est śūnyatā (la vacuité), mais crée une situation où nous l'expérimentons sur le champ. Cette dernière n'est pas pour lui une réalité existant ailleurs que dans le temps où il l'évoque. [préface de Fabrice Midal]

    Couverture de Enseignements secrets
    page(s) 9
  • Vacuité, source de plénitude

    Si l'univers que nous percevons est un rêve, alors quelle est la réalité ? Qu'y a-t-il derrière le voile de la Maya, l'illusion ? Est-ce une créature monstrueuse à la Lovecraft ? Un être à quatre dimensions aux propriétés étranges ?

    Pour les bouddhistes de l'École Sautrāntika – apparue aux alentours du IIème siècle avant J-C. et qui s'opposa à la scolastique bouddhiste – la réalité est profondément discontinue. Toute perception, tout état interne ou externe, sont composés d'instants (ksana) qui se suivent les uns les autres, jaillissent et disparaissent, entrecoupés de minuscules moments de vide.

    Si nous ne voyons pas cette réalité, c'est que nous manquons d'attention, de cette « vision profonde » que donne la pratique spirituelle.

    Pris par la dynamique de l'illusion, ces instants forment une image ayant une apparence de continuité. Cette image illusoire qui se superpose à la réalité discontinue des instants, se nomme samtana (santanapāli). Samtana est le rêve qui nous illusionne.

    Robert Kientz qui pratique la méditation vipassanā auprès d'un moine bouddhiste en Birmanie, eut la révélation de cette discontinuité universelle.

    Après plusieurs semaines de pratique, son corps, son esprit, le monde entier, lui apparurent dans leur réalité. Cette réalité est une succession d'états de conscience distincts qui apparaissent, disparaissent, extrêmement rapidement, beaucoup trop rapidement pour être saisis par la conscience ordinaire. Rien n'était fixe, même son corps prenait une apparence puis une autre.

    Il n'y avait aucun « moi » stable, aucune essence permanente, aucune substance fixe. Les phénomènes surgissaient du vide et y retournaient sans but, sans raison. Il n'y avait pas de penseur, seulement des pensées qui se succédaient, pas de « moi » percevant, seulement des perceptions.

    Toute forme se révélait éphémère, fluctuante, instable, et c'était le sens le plus profond de l'impermanence dont parle le Bouddha qui n'est pas une simple théorie philosophique, mais le fruit d'une expérience précise. […]

    Ultimement l'univers est donc vacuité et ce vide qui est le réel est source de plénitude.

    Couverture de L’univers est un rêve
    page(s) 45-47
  • Disparaître dans la vacuité

    Inspirant sans effort, vous revenez naturellement à vous-même avec une forme et une couleur. En expirant, vous disparaissez peu à peu dans la vacuité – une page vierge, blanche. Voilà ce qu'est shikantaza. Le point important  est votre expiration. Au lieu d'essayer de revenir à vous en inspirant, disparaissez dans la vacuité en expirant.

    Couverture de Libre de soi, libre de tout
    page(s) 24
  • Assumer sa responsabilité d'homme

    Quand la structure sociale ne peut plus refléter un ordre sacré, l'homme doit faire retraite en lui-même et entretenir un rapport direct et personnel à cette dimension. Telle est actuellement la situation dans laquelle nous nous trouvons : alors que l'enseignement le plus ultime est présenté publiquement, il n'existe plus aucune situation sociale le préservant et lui donnant un terrain propice pour qu'il puisse prendre corps.

    La détresse qui en résulte recèle néanmoins des ferments de salut. Chacun a désormais le devoir d'assumer sa responsabilité d'homme, situation que Heidegger, à la suite de Kierkegaard, décrit comme marquée par le sceau de l'angoisse – angoisse pensée non pas négativement mais comme l'élément de dévoilement de notre liberté, responsabilité insurmontable dont on n'est jamais complètement quitte. Une telle épreuve n'a rien de psychologique, mais elle renvoie au devoir, pour chacun, d'être le centre de sa propre vie – un centre qui ne soit ni fixé une fois pour toutes ni ce par rapport à quoi tout s'oriente, mais que chacun de nous avons à être, un centre non fixe, en expansion, « centrifuge », fondamentalement ouvert et « vide ».

    Couverture de Chögyam Trungpa
    page(s) 30-31
  • Juste présent à ce qui surgit et disparaît

    Durant une journée de zazen […], si on continue cette concentration pendant un certain temps, on peut alors retrouver un esprit vacant, disponible, lumineux, non obscurci par les pensées. Toutes nos préoccupations s'évanouissent et on peut en constater la vacuité. Cette vacuité ne doit pas devenir une image ou une conception. C'est la nature réelle de toutes choses avec laquelle on s'harmonise naturellement lorsqu'on arrête de suivre ses pensées, lorsque l'on vit à nouveau à travers le corps, la respiration, en étant juste présent à ce qui surgit et disparaît d'instant en instant (le processus de la vie de chaque instant). On ne s'attache pas à ses pensées. On ne dépend de rien.

    Couverture de Le champ de la vacuité
    page(s) 11
  • L’instabilité de notre condition nous met sur le chemin de śūnyatā

    S'éveiller à l'instabilité de notre condition, cette Première Noble Vérité, est en soi un premier geste de réduction qui nous met sur le chemin de śūnyatā. J'utilise à dessein le terme de « réduction » dans son sens phénoménologique. En tant que changement de conscience de type réflexif, il représente l'une des deux possibilités majeures destinées à interrompre l'attitude naturelle, l'autre consistant en une suspension délibérée, à titre de préparation à une analyse ultérieure et à l'intuition (intuition eidétique/réduction transcendantale) :

    [D]ans sa fonction méthodique […], l'angoisse réductive n'est absolument pas différente de la réduction transcendantale en mode husserlien, même si elle se déploie dans une dimension tout à fait nouvelle : non plus celle de la réflexion, de l'idéation, de l'abstraction et de l'intuition, mais celle de la Stimmung, de la tonalité affective comme être primordialement accordé et ouvert au monde, de la Befindlichkeit, du sentiment de la situation comme révélation première du « là » et de la déréliction (Geworfenheit).

     

    Couverture de Le cercle créateur
    page(s) 386
  • Vacuité est aussi plénitude et ouverture

    Śūnyatā (en sanskrit ; en tibétain : stong pa nyid) est traduit d'habitude par « vacuité ». […]

    Śūnya vient de la racine śū, que l'on a rendue par « enfler », « gonfler », selon deux acceptions : soit un espace creux, caverneux, soit, également, le caractère d'être plein, comme le ventre d'une femme enceinte. Les deux significations sont impliquées à titre égal dans les traditions bouddhistes, mais, malheureusement pour les lecteurs occidentaux, seul le premier sens a été conservé dans la traduction initiale, avec la seule acception de « vacuité » connotée en « vide ».

    Comme l'a fait apparaître de façon on ne peut plus évidente le travail contemporain de traduction, plusieurs autres options s'avèrent plus pertinentes : la plénitude ou le caractère de ce qui est plein (fullness), l'interdépendance du champ tout entier des événements et du sens, l'ouverture (openness) ou bien la dimension d'ouverture.

    Couverture de Le cercle créateur
    page(s) 383-384
  • L’absence d’identité substantielle

    [J]e ne vais m'intéresser ici qu'à un angle d'attaque du projet, à savoir la signification centrale de śūnyatā en tant qu’absence d’identité substantielle, tout autant dans les apparences du monde que dans notre identité personnelle.

    Couverture de Le cercle créateur
    page(s) 382-383
  • Tout est esprit

    L'école Yogācāra-Vijñānavāda est avant tout caractérisée par sa position philosophique de type dit idéaliste. Pour elle, il n'y a pas réellement de monde objectif, tout réside dans l'esprit, tout est esprit. Selon cette conception, les objets du monde extérieur n'existent donc pas en tant que phénomènes séparés de la conscience, ce sont avant tout des phénomènes mentaux, leur nature est celle d'objets de connaissance. Le monde sensible ne possède aucune réalité et n'existe pas en tant que tel, seule existe sa représentation consciente, que nous hallucinons par erreur comme solide. Le monde, dans cette perspective, n'existe pas en dehors de la représentation que nous nous en faisons.

    Lorsque nous arrivons à réellement penser cette perspective, l'illusion que nous avons d'un monde objectif devient apparente, nous comprenons que le monde extérieur n'existe que dans notre esprit. Ce qui nous avait paru comme un support stable se dérobe, nous avons alors une certaine notion de la vacuité des phénomènes, condition de l'éveil.

    Couverture de Zen et connaissance
    page(s) 17
  • « Je suis »

    Revenir sans cesse dans la simple intuition ou pressentiment :

    « Je suis »
    Je suis libre
    de tout conditionnement,
    de toute limite,
    de toute mémoire,
    de tout savoir,
    de toute hérédité,
    de tout passé,
    de tout avenir.
    Je suis un espace qui contient et accueille tout ce qui vit et respire :
    les justes et les injustes, les grands et les petits, les pauvres et les riches.
    Je suis présent,
    présence réelle du Réel souverain,
    je suis Cela,
    l'inconditionné, l'innommable, l'impensable,
    l'intangible, l'incréé, l'infinie liberté,
    pur espace, pure vacuité,
    je suis Cela.
    « Je suis ».

    Couverture de L'assise et la marche
    page(s) 19
  • Communiquer vraiment jusqu'au cœur

    Entrer en relation avec autrui en toute compassion est un pari. Communiquer vraiment jusqu'au cœur et être présent à quelqu'un d'autre – enfant, conjoint, parent, client, patient ou la SDF dans la rue – cela signifie ne pas se fermer à cette personne, ce qui veut dire, avant tout, ne pas se fermer à soi-même. Ça veut dire nous autoriser à ressentir ce que nous sentons sans le rejeter. Ça veut dire accepter tous les aspects de nous-mêmes, y compris ce que nous n'aimons pas.

    Faire cela demande de l'ouverture, ce que dans le bouddhisme on appelle parfois la vacuité – ne pas s'attacher ou se retenir à quoi que ce soit. Ce n'est que dans un espace ouvert où l'on ne porte pas de jugement qu'il est possible de reconnaître ce que l'on ressent. Ce n'est que dans un espace ouvert où nous ne sommes pas prisonniers de notre propre interprétation de la réalité que nous pouvons voir, entendre et sentir qui sont vraiment les autres. C'est ce qui permet d'être et de communiquer avec eux correctement.

    Couverture de Quand tout s’effondre
    page(s) 115 (13 - Élargir le cercle de compassion)
  • Accordé au cours des choses selon le sans-penser

    Ce que l'école Huayan pense dans les termes d'une totalité binaire, l'homme du chan renonce à le penser d'une façon théorique ou abstraite. Héritier du taoïsme, il s'accorde au cours des choses selon le sans-penser. Cette union vide à la vacuité d'un monde non pensé est une adhésion au principe même du vivant. Ceux qui, dupes du langage objectivant, ne comprennent pas intimement cette réalisation sans sujet ni objet la conçoivent comme une « fusion », mais ce terme est trompeur. Là où le sage se libère automatiquement du percept au profit de l'état primordial du sans-penser, ils sont restés enfermés dans la pensée pensante et donc dans l'aliénation à leur nature foncière.

    Couverture de Voyageant parmi les nuages
    page(s) 68