Christian Bobin

Portrait de Christian Bobin

Mais que vient donc faire Christian Bobin (né en 1951) au beau milieu de ces maîtres de méditation ? Pour le méditant que je suis, sa façon de ne pas discriminer entre le morne et le sublime, de rester quoi qu'il en soit ouvert et de se voir par là-même soudain traversé de fulgurances, c'est le plus simple et bel enseignement qui soit.

Quand le gris de la vie me cerne et menace de m'engloutir, j'attrape un Bobin et me cale entre deux oreillers. Empruntant un instant le regard qu'il pose sur les scènes d'une vie pas moins grise, aussitôt rafraîchis mes yeux retrouvent la lumière et je reprends léger mon bonhomme de chemin.

Contribution dans

Quelques ouvrages

Quelques extraits

• Chercher en tout l'innocence

Il faut chercher en tout l'innocence – on finira par l'y trouver.

page(s) 162
• Sauter de seconde en seconde

[P]arfois, chaque seconde qui passe peut vous amener la mort ou la joie pure d'y avoir encore échappé – jusqu'à la seconde suivante où tout recommence. Je décide d'utiliser chaque seconde comme ça. Utiliser n'est pas un mot heureux : je décide d'aller d'une seconde à l'autre comme on saute d'un rocher au suivant, pour traverser une rivière profonde. Éclaboussée, rafraîchie. Jamais noyée.

page(s) 35
• L'amour et le silence

[I]l en va du silence comme de l'amour. On passe sa vie à les fuir. […]

La misère, elle n'est pas dans cette salle mais sur l'écran où le jeune homme continuait de parader. La misère c'est ce bruit de fond partout grésillant – un empêchement à l'amour et au silence.

page(s) 103-104
• La lumière donnée à tous

Le manque est la lumière donnée à tous.

page(s) 13
• La vie et la mort dépassées

[O]n peut être parfois si présent à ce qu'on vit qu'il n'y a plus besoin de paradis – aucun mot ne suffisant pour dire la vie et la mort dépassées.

page(s) 69
• Aimer ce qui est simple

Aimer c'est aimer ce qui est simple, et donc mystérieux. Ce qui est compliqué n'est jamais mystérieux. Ce qui est compliqué est sans importance.

page(s) 74
• Lézardes

[S]i ce monde n'est que muraille, cette muraille a des lézardes, des fissures par lesquelles quelque chose passe qui n'a guère de nom, et c'est tant mieux.

page(s) 58
• Les vrais secours

La main d'une brise qui rebrousse le duvet sur le ventre d'un moineau, l'eau qu'un soleil enflamme dans un verre, une phrase dans un livre, vaillante comme une petite fille sautant à la corde : les vrais secours ne sont jamais spectaculaires.

page(s) 114
• La vie n'attend que nos yeux

La vie n'attend que nos yeux pour connaître son sacre.

page(s) 179
• Le monde serait sauvé

Si nous avions le dixième de l'attention qu'a le chat pour le vol de la mouche – le monde serait sauvé.

page(s) 142
• Un enfant de chœur de la lumière terrestre

Laver une assiette ou éplucher un légume c'est devenir un enfant de chœur de la lumière terrestre.

page(s) 40
• En finir avec la mort

L'amour est une manière violente d'en finir avec la mort et ses raisons.

page(s) 72
• Une hémorragie éternelle de présent

Le futur n'existe pas dans l'enfance. Il n'existe pas plus dans l'enfance que dans le sommeil ou l'amour. Il n'y a ni futur ni passé dans la vie. Il n'y a que du présent, qu'une hémorragie éternelle de présent.

page(s) 34
• La formule de l'esprit

Ne pas chercher son intérêt mais l'intérêt de ce qu'on voit est la formule de l'esprit.

page(s) 158
• La volonté ne va pas avec l'amour

Le portrait était manqué, il n'y avait rien à en sauver. Vous vouliez trop ce texte et la volonté ne va pas avec l'écriture, pas plus qu'avec l'amour. On ne dit pas : « je voudrais vous aimer ». On dit : « je vous aime » et, le disant, on découvre un amour bien plus profond que tout vouloir.

page(s) 101
• Écouter

Écouter c'est quand on aime.

page(s) 45
• Le souci de soi

Le souci de soi est une chose qui encombre les vivants. Peut-être est-ce le premier sac de sable que les morts jettent par-dessus leur nacelle, pour bondir au plus haut, hors de vue.

page(s) 42
• Commencer à penser et à aimer

Maintenant que tout est détruit nous pouvons enfin commencer à penser et à aimer.

page(s) 146
• Une armure sans défaut

L'armure sans défaut de la joie.

page(s) 69
• Rire

Le maçon montait son mur comme un poète écrit son poème, en prenant soin de chaque détail. La joie du travail en train de se faire ensoleillait son visage. « Un jour, dit-il, j'ai vu un rat énorme sortir d'une maison que je rénovais. Il était si laid que j'ai éclaté de rire. » Ce rire faisait de lui un sage. Le diable fuit de n'être pas pris au sérieux.

page(s) 41