Le monde connu, en cette itinérance [l'auteur fait une virée à moto autour de chez lui], ciel, montagnes, vallées, est une expérience du corps propre, lequel inclut sa monture mécanique. Ce que l'on attendait des lumières de la philosophie, en vain, s'obtient tacitement dans le monde qui s'éprouve. La lumière de la pensée n'éclaire rien, ou si peu, quand il s'agit du vivre.
Laissons Sartre et Merleau-Ponty dans leur salon bourgeois, à leurs cogitations sur la couleur rouge du tapis, sur l'en-soi d'un bibelot posé sur la console de marbre, assis dans leurs fauteuils profonds.Vos vases en porcelaine montés sur socle, messieurs, vos statuettes de bronze, ne sont que des cadavres.
Les philosophes qui savaient monter à cheval et tirer à l'arc avaient une prise sur le vivant du réel, qui s'est perdue depuis Montaigne. Ils le savaient aussi, les maîtres d'Extrême-Orient, que le corps et l'esprit marchent ensemble. Que ce qui vient en situation d'idées pertinentes transite du corps vers la pensée comme une émergence.