Sharon Salzberg

Portrait de Sharon Salzberg

Sharon Salzberg (née en 1952) découvre le bouddhisme à l'université en 1969, à la suite de quoi elle part en Inde en 1971 pour participer à une première retraite intensive de méditation vipassanā. Pendant plusieurs années, elle recevra les enseignements de divers maîtres dont S. N. Goenka.

À son retour aux États-Unis en 1974, elle crée avec Jack Kornfield et Joseph Goldstein dans le Massachusetts l'Insight Meditation Society pour y enseigner la méditation vipassanā. Elle fondera par la suite en 1989 le Barre Center for Buddhist Studies et en 1998 The Forest Refuge, un centre pour des retraites de méditation de longue durée.

Sharon Salzberg est l'une des figures majeures de la méditation aux États-Unis. Elle s'est très tôt démarquée de ses pairs Jack Kornfield et Joseph Goldstein, focalisés sur la pleine présence, par l'accent mis sur les pratiques de bienveillance aimante. À une époque où nous témoignons de si peu de bienveillance – envers autrui comme envers nous-mêmes –, ses enseignements sont essentiels.

Maîtres de Sharon Salzberg

Quelques ouvrages

Quelques extraits

• En plongeant dans le miroir de la présence de l'autre

[C'est] la qualité de présence simple et totale du Karmapa qui permit à mon ami de vivre l'expérience d'être pleinement aimé. […] Être entièrement présent à l'autre est un authentique geste d'amour, nul besoin de grandes effusions.

Le simple fait de se retrouver devant une personne qui, comme le Karmapa, manifeste cette présence sincère résonne comme un appel à s'éveiller à sa véritable nature. Cette personne est complète en elle-même, elle n'attend rien de nous, n'offre aucune prise à nos projections. Comment pourrait-il y avoir des projections ou de la manipulation dans une telle relation ? En plongeant dans le miroir de ses yeux, nous nous reconnaissons, et découvrons tout ce que nous pouvons être.

page(s) 36-37
• Je ne suis rien et je suis tout

Comme l'a déclaré le grand maître indien Nisargadatta Maharaj : « La sagesse me dit que je ne suis rien, l'amour que je suis tout. Entre les deux, ma vie s'écoule. »

« Je ne suis rien » ne signifie pas qu'il y a une terre désolée au fond de moi. Si nous ne sommes rien, la conscience nous conduit à un espace limpide et dégagé, dépourvu de centre et de périphérie, sans cloisonnements. Un espace où aucune barrière ne peut entraver l'expression sans limite de l'amour.

Or, en n'étant rien de cette façon, nous sommes aussi, inévitablement, tout. Comprendre que l'on est « tout » ne veut pas dire s'autoglorifier, mais reconnaître sans le moindre doute que l'on n'est pas séparé du reste du monde.

Ensemble, l'espace ouvert et dégagé du « rien » et l'interconnexion du « tout » nous éveillent à notre nature véritable.

page(s) 38
• Dignes de recevoir la grâce de l’amour

À partir du moment où nous avons une vision claire de nous-mêmes et de la vie, nous savons que nous pouvons nous appuyer sur cette vérité. Nous nous rappelons que nous sommes dignes de recevoir la grâce de l’amour.

page(s) 21
• Devenir plus conscients des messages reçus

Quelle que soit l'origine des messages reçus, il est possible d'en devenir plus conscient. On peut identifier ceux que nous avons intégrés et travailler pour nous en éloigner, voire, au fil du temps, les remplacer par un esprit curieux, un cœur grand ouvert et un sentiment de vitalité accru. Nous n'arriverons peut-être pas à les éliminer, mais rien ne nous empêche de les remettre en question. Plus nous le ferons, moins ils prendront de place et nous limiteront. Alors, nous nous sentirons plus libres d'avoir des relations plus authentiques avec les autres – et nos désirs les plus profonds.

page(s) 26
• Impossible d’obtenir des autres ce qu’on est incapable de se donner soi-même

Quand on se sent pauvre au fond de soi, l'amour pour l'autre se transforme trop aisément en avidité : une recherche incessante de réassurance, de louanges, et de preuves de sa valeur. La sensation qu'il nous manque quelque chose nous pousse à attendre de l'autre qu'il nous complète. Sauf que les choses ne fonctionnent pas ainsi et qu'on ne peut obtenir des autres ce qu’on est incapable de se donner soi-même.

page(s) 27
• En harmonie avec la vie même

[L]'amour de soi, de façon totalement injustifiée, a très mauvaise presse. Nous avons tous entendu des jugements affirmant que s'aimer est narcissique, égoïste, complaisant, l'illusion suprême d'un ego incontrôlé qui cherche à devenir « numéro un ».

La réalité est tout le contraire. En cas de dépressurisation dans un avion, personne ne songerait à qualifier d'égoïste un père qui enfile son propre masque à oxygène avant d'aider son enfant à mettre le sien. D'une façon plus générale, s'aimer sincèrement revient à être en harmonie avec la vie même, donc avec tous les autres. […]

[E]n cultivant la tendresse et la compassion pour l'ensemble de notre vie – nos succès, mais aussi toutes nos expériences difficiles et douloureuses –, nous devenons naturellement plus bienveillants et responsables vis-à-vis des autres. Notre cœur s'adoucit et nous comprenons que chacun se débat à sa manière avec cette vie humaine parsemée de merveilles et de chagrins que Zorba le Grec qualifiait de « totale catastrophe ».

page(s) 22-23
• En amont de la peur et de l'isolement

La transformation naît en regardant profondément en soi, pour trouver un état préexistant à la peur et au sentiment d'isolement, un état de plénitude inaliénable.

En contact avec soi-même et la vérité de sa propre expérience, on découvre qu'être vivant signifie être complet.

page(s) 35
• L'amour bienveillant versus l'amour étroit

L'amour bienveillant ne s'obtient pas par une négociation ou un échange. Le désir dit : « Je t'aimerai, je m'occuperai de toi, je t'offrirai ci ou ça tant que tu répondras à mes attentes et satisfera mes besoins. » Dans ce genre de marché, nos sentiments d'amour se restreignent aux personnes que l'on apprécie parce qu'elles nous donnent ce que l'on attend. On aime quelqu'un, puis il nous déçoit, et on ne l'aime plus. Cette forme d'amour limitée se fonde sur le désir et l'attachement.

page(s) 84
• La capacité d’aimer quoiqu’il arrive

D'un côté, il y avait cette vision conventionnelle que j'avais toujours eue de moi-même : une personne qui ne pouvait avoir de l'amour dans sa vie que si quelqu'un d'autre lui en donnait, un peu comme si l'amour était un colis aux mains d'un livreur tout-puissant qui, s'il changeait d'avis et rebroussait chemin devant ma porte, me laisserait totalement démunie, irrémédiablement incomplète, et privée de cet amour tant désiré.

De l'autre côté, se trouvait le reflet de celle que je soupçonnais d'être vraiment moi : une personne possédant au fond d'elle-même la capacité d’aimer quoiqu’il arrive et quel que soit celle ou celui qui se trouve devant elle ; une personne en mesure d'accéder à l'amour mis en lumière ou à l'épreuve par l'autre, mais ne pouvant en aucun cas être dotée ou privée de cette faculté par quiconque. J'ai emprunté le second chemin. […]

Je considère cet amour vrai comme la plus fondamentale de toutes nos facultés innées, un pouvoir indestructible, quelles que soient les épreuves qui nous attendent ou celles que nous nous avons traversées. Elle peut être enfouie, obscurcie, difficile à atteindre, ou sembler peu digne de foi, mais elle est toujours présente.

page(s) 14-15
• Être attentif, c'est aimer

La plénitude et l'unité constituent notre nature la plus fondamentale d'êtres humains. […]

L'abandon de nos fixations, le fait d'être simplement heureux équivaut à une brusque libération. […]

Parce qu'elle ne dépend de personne ni d'une quelconque situation extérieure, cette libération s'accompagne de la joie de se sentir en sécurité, inviolable. L'esprit devient rayonnant, lumineux dans l'unification, ouvert, sans rien à ajouter ou à ôter, sans fragmentation et à l'abri de la division.

Cette vaste plénitude d'être que l'on ressent comme du bonheur porte aussi le nom d'amour. Être totalement présent, sans division ni fragmentation, c'est aimer. Être attentif, c'est aimer.

page(s) 37-38
• Se reconnaître pleinement vivant et complet

Je suis convaincue qu'il n'existe qu'une seule forme d'amour : l'amour véritable, qui s'efforce de s'exprimer en nous malgré nos certitudes réductrices, nos distorsions culturelles et toutes ces habitudes fondées sur la peur, le mécontentement de soi et l'isolement que nous avons tendance à développer à mesure que nous avançons dans la vie. Chacun de nous est capable de faire l'expérience de l'amour véritable. À partir du moment où nous l'abordons avec cette ouverture, il devient possible de trouver l'amour dans les moments de rencontre les plus banals : avec le caissier du supermarché, un enfant, un animal domestique, la nature en forêt – et à l'intérieur de nous.

L'amour véritable apparaît quand on se reconnaît pleinement vivant et complet en dépit de ses blessures, de ses craintes ou de sa solitude. C'est un état dans lequel on s'autorise à être vu en pleine lumière par soi-même et par les autres tout en offrant l'éclat de son propre regard au monde environnant. C'est un amour qui guérit.

page(s) 15-16
• Séparé des autres

On décide que la douleur des autres n'a aucun lien avec soi. On rejette la souffrance du monde de peur qu'elle ne gâche ou n'annihile notre propre bonheur. Bloqué dans cette attitude défensive, on s'enferme dans un isolement intérieur si profond que l'expérience de la joie authentique devient impossible. Quel étrange conditionnement : se sentir si seul dans la douleur et si vulnérable et éloigné des autres dans le bonheur !

page(s) 32
• Distinguer parmi nos habitudes

L'intégrité qui devient la nôtre sur un chemin spirituel naît de la capacité à distinguer les habitudes et les influences qui nous font du bien mentalement – celles qui conduisent à l'amour et à la conscience – de celles qui nous nuisent et renforcent le sentiment illusoire d'être coupé des autres.

page(s) 24
• S’écarter de l’automatisme d’attaque ou de fuite

Dans l'ensemble, notre vécu est un riche mélange de positif et de négatif. Cependant, les biologistes évolutionnistes ont découvert que nous étions victimes d'un « biais de négativité » qui nous rend particulièrement sensibles au danger et aux menaces afin de ne pas nous faire dévorer par un tigre (c'est du moins ce que nous dit notre système nerveux). Pour assurer notre survie, le cerveau mémorise plus intensément les événements négatifs que les positifs (mieux vaut se rappeler l'endroit où se cache le tigre). C'est pourquoi il est parfois si difficile de faire remonter des souvenirs et des sentiments de joie et de bien-être quand on se sent perdu ou découragé.

Bien que cette réaction par défaut soit essentielle face à un vrai danger, elle peut aussi entraîner une grande souffrance quand aucun péril ne nous menace. Heureusement, grâce à la méditation, il est possible de remodeler notre système nerveux pour qu'il s'écarte de cet automatisme d’attaque ou de fuite : on apprend à reconnaître ses pensées et ses sentiments pour ce qu'ils sont sans les laisser nous submerger.

page(s) 24
• Suivre le chemin de nos aspirations

Lorsqu'on s'entend répéter sur tous les tons qu'il faudrait être plus intelligent, plus branché, plus productif, avoir une meilleure santé et j'en passe, cela demande un réel courage de prendre le temps et la distance nécessaires pour suivre le chemin, parfois très différent, vers lequel nous entraînent nos talents, nos aspirations, et notre cœur.

page(s) 25