Si, alors que vous êtes en pleine crise, vous tenez votre attention éveillée, vous allez commencer à sentir en vous-même une conscience témoin, une présence pleine de sagesse, que l'on pourrait nommer « celui qui sait ». Cette « présence connaissante », c'est la conscience elle-même, et elle est là, en vous, à chaque instant de votre vie, même lorsqu'elle semble avoir complètement disparu. Même dans les moments les plus pénibles d'une maladie ou d'un deuil, dans vos dépressions et chagrins les plus profonds, lors de vos peurs et défis les plus graves, celui en vous qui sait veille toujours, calme et lucide. Il est dans l'acceptation de l'événement. Au-delà de la situation immédiate, il perçoit quelque chose de beaucoup plus vaste.
peur
Extraits étiquetés avec : peur
Celui qui sait
page(s) 20-21S’écarter de l’automatisme d’attaque ou de fuite
Dans l'ensemble, notre vécu est un riche mélange de positif et de négatif. Cependant, les biologistes évolutionnistes ont découvert que nous étions victimes d'un « biais de négativité » qui nous rend particulièrement sensibles au danger et aux menaces afin de ne pas nous faire dévorer par un tigre (c'est du moins ce que nous dit notre système nerveux). Pour assurer notre survie, le cerveau mémorise plus intensément les événements négatifs que les positifs (mieux vaut se rappeler l'endroit où se cache le tigre). C'est pourquoi il est parfois si difficile de faire remonter des souvenirs et des sentiments de joie et de bien-être quand on se sent perdu ou découragé.
Bien que cette réaction par défaut soit essentielle face à un vrai danger, elle peut aussi entraîner une grande souffrance quand aucun péril ne nous menace. Heureusement, grâce à la méditation, il est possible de remodeler notre système nerveux pour qu'il s'écarte de cet automatisme d’attaque ou de fuite : on apprend à reconnaître ses pensées et ses sentiments pour ce qu'ils sont sans les laisser nous submerger.
page(s) 24Se reconnaître pleinement vivant et complet
Je suis convaincue qu'il n'existe qu'une seule forme d'amour : l'amour véritable, qui s'efforce de s'exprimer en nous malgré nos certitudes réductrices, nos distorsions culturelles et toutes ces habitudes fondées sur la peur, le mécontentement de soi et l'isolement que nous avons tendance à développer à mesure que nous avançons dans la vie. Chacun de nous est capable de faire l'expérience de l'amour véritable. À partir du moment où nous l'abordons avec cette ouverture, il devient possible de trouver l'amour dans les moments de rencontre les plus banals : avec le caissier du supermarché, un enfant, un animal domestique, la nature en forêt – et à l'intérieur de nous.
L'amour véritable apparaît quand on se reconnaît pleinement vivant et complet en dépit de ses blessures, de ses craintes ou de sa solitude. C'est un état dans lequel on s'autorise à être vu en pleine lumière par soi-même et par les autres tout en offrant l'éclat de son propre regard au monde environnant. C'est un amour qui guérit.
page(s) 15-16La vérité est vivante
La vérité n'a pas de chemin, et c'est cela sa beauté : elle est vivante. [… C]ette chose vivante est ce que vous êtes en toute réalité : elle est votre colère, votre brutalité, votre violence, votre désespoir. Elle est l'agonie et la douleur que vous vivez.
La vérité est en la compréhension de tout cela, vous ne pouvez le comprendre qu'en sachant le voir dans votre vie. Il est impossible de le voir à travers une idéologie, à travers un écran de mots, à travers l'espoir et la peur.
Nous voyons donc que nous ne pouvons dépendre de personne. Il n'existe pas de guide, pas d'instructeur, pas d'autorité. Il n'y a que nous et nos rapports avec les autres et avec le monde. Il n'y a pas autre chose.
page(s) 22-23Responsables de l’état général du monde
En tant qu'individus humains vivant dans la monstrueuse laideur de ce monde, demandons-nous donc s'il est possible de mettre fin à des sociétés basées sur la compétition, la brutalité et la peur. […]
[N]ous, individus, en tant qu'êtres humains, en quelque partie du monde que nous vivions, ou à quelque culture que nous appartenions, nous sommes totalement responsables de l’état général du monde.
page(s) 21Une façon d'être contagieuse
Être connecté à son véritable soi est une façon d'être contagieuse. Une personne éveillée, aimante, crée un champ de conscience dans lequel les autres se sentent en sécurité et deviennent plus aimants. Une personne apeurée ou en colère crée aussi un champ, mais qui engendre division et peur.
page(s) 24Faire confiance et créer de l'espace pour les sentiments
Pour votre ego, les émotions créées par vos pensées paraissent toujours légitimes et font véritablement partie de votre identité. Pour votre corps, en revanche, la colère, le ressentiment, la peur, la suffisance ou l'autodérision générés par vos pensées sont de vrais poisons chimiques. Le cerveau libère des neuropeptides dans votre sang et vos muscles se raidissent, votre tension artérielle augmente, vos glandes surrénales sécrètent du cortisol et la résistance à l'insuline est proche. Il existe un mot simple pour décrire ces symptômes : le stress. Le genre de stress qui conduit aux maladies cardiaques, au diabète, aux congestions cérébrales et probablement à certains cancers, sans parler du sentiment d'être malheureux.
Ironiquement, alors que l'ego justifie des émotions pouvant être très destructrices, comme le ressentiment et la haine, il ne vous permet pas souvent de vous arrêter sur des sentiments expansifs, comme la joie ou l'amour, et il fuit instantanément tout sentiment menaçant, comme l'impuissance. Et pourtant, le fait de vous ouvrir aux sentiments les plus élevés et les plus bas ne vous blessera jamais autant que les émotions destructrices. En faisant de la place à ces sentiments, vous pourrez établir une relation plus saine avec des situations apparemment inextricables (conflits familiaux de toute une vie, par exemple). Vous écarterez également vos doutes sur votre propre valeur. Il est sage de se méfier de ses émotions et d'apprendre à se libérer de celles qui nous empoisonnent, tout en apprenant à faire confiance et à créer de l'espace pour les sentiments, y compris les plus sombres.
page(s) 22-23Les deux erreurs fondamentales
Quelles sont [nos] erreurs ? Premièrement, nous avons tendance à nous identifier à nos propres pensées, ce qui crée souvent une réalité émotionnelle destructrice. Le fait de croire en nos pensées – ou en celles inculquées par notre famille et la société – sans les remettre en cause, nous met souvent en conflit avec nous-mêmes, avec les autres et avec la vie elle-même.
Deuxièmement, beaucoup de nos sentiments nous font peur, et, en essayant de les fuir, notre ego se ferme à une grande partie de notre vie intérieure et à la source de la véritable santé.
page(s) 22L'ego cause de la souffrance
Si la médecine moderne sauve souvent des vies, elle ne traite pas la véritable origine de la souffrance. À plus d'un titre, la psychologie moderne non plus. En effet, celle-ci part du principe que le soi distinct, l'ego, avec toutes ses peurs et tous ses espoirs, est celui que vous êtes vraiment. […]
Votre souffrance profonde vient moins de l'état de votre corps que de ce que votre ego vous en dit. Il en va de même pour les problèmes relationnels : c'est généralement plus ce que vous vous dites sur le comportement d'une personne qui suscite votre mécontentement que ce qu'elle fait vraiment.
page(s) 15Dégénérescence de la douceur en niaiserie et new-age
La douceur est […] divisée en deux par les instances de contrôle économico-sociales. Sur le plan charnel, elle est abâtardie en niaiserie. Sur le plan spirituel, en potion new-age et autres méthodes qui rivalisent pour nous faire croire qu'il suffit d'y croire pour que tout fonctionne. Les théories d'amélioration du moi et de recherche du bonheur participent malgré elles de ce grand marché du « mieux-être » qui refuse d'entrer dans le négatif et la confusion et la peur comme éléments essentiels de l'humain, et vitrifient l'avenir comme le présent. Cette division est dans son essence redoutable car elle attaque le lien que la douceur établit entre l'intelligible et le sensible.
page(s) 41-42La douceur comme intelligence
La douceur est d'abord une intelligence, de celle qui porte la vie, et la sauve et l'accroît. Parce qu'elle fait preuve d'un rapport au monde qui sublime l'étonnement, la violence possible, la captation, la peur en pur acquiescement, elle peut modifier toute chose et tout être. Elle est une appréhension de la relation à l'autre dont le tendresse est la quintessence.
page(s) 28Aimer l'égalité de l'autre
Permettre l’amitié, c'est renoncer à son pouvoir, oublier sa peur, c'est reconnaître et aimer l'égalité de l'autre.
page(s) 27Trois types de générosité
Il existe traditionnellement trois types de générosité. Le premier est la générosité ordinaire : donner des biens matériels ou mettre les autres à l'aise.
Le deuxième est la protection contre la peur. On rassure les autres et on leur apprend à ne pas se sentir complètement tourmentés par leur vie et à ne pas paniquer. On les aide à découvrir la bonté fondamentale et la pratique spirituelle et on leur montre qu'ils possèdent les moyens d'être leur propre soutien. C'est donc le don du courage.
Le troisième type de générosité est le don du dharma. On montre aux autres qu'il existe une voie faite de discipline, de méditation et d'intellect ou connaissance.
Grâce à ces trois types de générosité, on peut ouvrir l'esprit des autres de façon à ce que leur mesquinerie, leur misère humaine et leur étroitesse d'esprit fassent place à des horizons plus ouverts.
page(s) 35-36Menace d’anéantissement, accomplissement
La métanoïa, ou conversion, c'est lorsque nous découvrons que la peur de notre anéantissement est l'occasion (kaïros) de notre accomplissement.
page(s) 22La psychothérapie comme moyen habile
Je suggère souvent à un étudiant de suivre une thérapie. Je la vois comme un moyen habile particulier qui est, pour certains, extrêmement utile. Pour certains d'entre nous, travailler régulièrement avec un thérapeute qui ne porte pas de jugement permet de vaincre les peurs et de développer enfin la bienveillance envers nous-mêmes.
page(s) 187 (21 - Inverser la roue du samsara)Laissons notre cœur se briser
Nous pensons qu'en nous protégeant de la souffrance nous agissons avec bienveillance envers nous-mêmes. En fait, nous ne faisons que devenir plus couards, plus endurcis et plus aliénés. Nous nous sentons comme séparés du tout. Cette séparation devient comme une prison qui nous limite à nos espoirs et à nos peurs personnels et au souci exclusif de nos proches. Curieusement, si notre objectif principal est d'essayer de nous protéger de l'inconfort de notre vie, nous souffrons. Et pourtant, quand nous ne nous renfermons pas et que nous laissons notre cœur se briser, nous découvrons notre parenté avec tous les êtres.
Sa Sainteté le Dalaï-Lama définit deux catégories d'égoïstes : ceux qui sont avisés et ceux qui ne le sont pas. Les égoïstes malavisés ne pensent qu'à eux-mêmes et aboutissent à la confusion et la douleur. Les égoïstes avisés savent que la meilleure chose qui puisse leur arriver c'est d'être présents aux autres. Par conséquent, ils connaissent la joie.
page(s) 126 (14 - L’amour qui ne mourra pas)Espoir-peur
En tibétain le mot espoir se dit rewa, le mot peur se dit dokpa. On se sert plus communément du mot re-dok, qui combine les deux. L’espoir comme la peur sont des sentiments à deux faces : quand il y en a une, il y a aussi l’autre.
page(s) 65 (7 - L’absence d'espoir et la mort)Deux grandes catégories d’émotions
[D]eux grandes catégories d’émotions :
• Les émotions primaires ou fondamentales présentes dès la naissance, avant toute mentalisation. […] Ce sont la peur, la tristesse, la colère, la joie, le dégoût, la surprise. Elles ont chacune leur tonalité particulière, incluant un ressenti spécifique et un schéma de réaction.
• Les émotions secondaires qui apparaissent dans le cadre des relations avec autrui et où la pensée intervient sous la forme d'un jugement ou d'une comparaison. Ce sont la honte, la peur du jugement d'autrui et du rejet, le dégoût de soi. Dans cette catégorie, j'inclus également des sentiments tels que la culpabilité, l'envie, l'humiliation, la jalousie, la haine qui présentent des caractéristiques communes avec les émotions secondaires : la relation avec autrui, la pensée et le jugement y jouent un rôle central.
page(s) 26-27La spiritualité dévoyée comme moyen de se rassurer
Le grand problème est que les enseignements spirituels ont été utilisés comme des moyens pour se rassurer soi-même, pour assurer, dans les termes du moi, une plus grande stabilité. C'est le point de départ, inévitable. On ne peut l'ignorer ni l'écarter. Nous devons commencer par les erreurs, ce qui est toujours un problème. La peur et le besoin de sécurité rendent l'acceptation de la spontanéité très difficile. Comme il est dit dans le Dharmapada : « Celui qui se sait ignorant, en vérité celui-là est un sage ».
page(s) 4Anticiper une souffrance qui n'existe pas encore
La dimension négative de la peur psychologique intervient dès que nous anticipons une souffrance qui n'existe pas encore et dont nous refusons l'éventualité. Tout notre esprit et, avec lui, notre corps, se crispe, en espérant nous y soustraire. Et, paradoxe, notre pensée agite avec insistance l'image de ce péril tout en rejetant désespérément qu'il puisse se produire.
page(s) 23