ego

Extraits étiquetés avec : ego

  • Faire le vide ?

    La méditation bouddhiste consisterait à faire le vide, entend-on souvent en Occident. L'expression a une connotation péjorative pour ceux qui croient déceler dans le bouddhisme une forme de nihilisme. Pour eux, les méditants entendraient, par cet artifice, s'abîmer dans un néant intérieur ou simplement s'échapper du monde.

    L'expression peut, au contraire, être chargée d'une éminente positivité dans certaines reconfigurations occidentales où le bouddhisme, débarrassé de ses aspects spirituels, est présenté comme une méthode de bien-être. La méditation serait alors le meilleur moyen de se ménager un espace de tranquillité au milieu des vicissitudes du monde moderne.

    Dire que la méditation permet de faire le vide rend peu justice, en réalité, à la proposition faite ; au demeurant, aucune école n'enseigne l'anesthésie mentale. Malgré ses multiples variantes et méthodes, la méditation bouddhiste sert une entreprise fondamentale : comprendre les ressorts qui gouvernent sa propre identité. Une telle compréhension nécessite un retour à soi et une tranquillité dans l'espace méditatif, mais la méditation ne se confond pas avec le calme de l'esprit, le calme est simplement la condition indispensable à ce travail intérieur. [Éric Rommeluère]

    Couverture de Vingt clés pour comprendre le bouddhisme
    page(s) 79
  • L’au-delà de la souffrance

    [L]'au-delà de la souffrance [est] un état de liberté complète obtenu lorsque l'on s'est affranchi des conditionnements du saṃsāra et de leurs causes. C'est la cessation définitive du saṃsāra, mais non un retrait passif hors du monde. C'est en effet le fruit d'une pratique énergique, qui consiste à adopter une conduite éthique irréprochable à l'égard de tous les êtres –  la discipline ; à dompter son esprit par la méditation qui consiste à apaiser pensées et passions pour accéder à la vision claire de la réalité ; et à développer la sagesse, laquelle dissout l'illusion du « soi » et la croyance à l'existence réelle des phénomènes qui nous entourent.

    Quand une telle pratique porte ses fruits, le karma résiduel s'épuise, les « actes  ne sont plus créateurs de conditionnements à venir, et le rideau de l'illusion samsarique s'écroule pour laisser place à la vision du réel dénué de toute surimposition. Ainsi, le monde n'est ni bon ni mauvais, ni saṃsāra ni nirvāna. C'est le regard ignorant que nous portons sur lui ainsi que nos actes (karma) qui conditionnent la forme douloureuse que ce monde revêt pour nous. [Philippe Cornu]

    Couverture de Vingt clés pour comprendre le bouddhisme
    page(s) 34
  • Un grain de bon sens

    Si la pratique spirituelle détend, si elle donne un peu de paix à notre esprit, c'est merveilleux – mais cette satisfaction que nous éprouvons personnellement a-t-elle quelque rapport avec ce qui se passe dans le monde ? La question fondamentale, c'est de savoir si nous vivons d'une façon qui ajoute de l'agressivité et de l'égocentrisme au chaos dans lequel nous nous trouvons, ou si nous y ajoutons un grain de bon sens dont le besoin se fait terriblement sentir.

    Couverture de Vivez sans entrave
    page(s) 10
  • Silence de soi, attention, gratitude

    L'intériorité que l'on découvre dans la solitude n'a rien à voir avec la promotion du moi, avec l'autosatisfaction : c'est le silence de soi, c'est une attention au monde, une gratitude aussi.

    Couverture de L'esprit de solitude
    page(s) 79
  • Respect de l’autre et maîtrise de soi

    La solitude s'avère le contraire de l'égocentrisme, du repliement sur soi et de la revendication pour sa petite personne. Le véritable solitaire se passe de témoins, de courtisans et de disciples. Ainsi parlait Démocrite : « Même dans la solitude, ne dis ni ne fais rien de blâmable. Apprends à te respecter beaucoup plus devant ta propre conscience que devant autrui ».

    Le solitaire sait qu'il a beaucoup à apprendre alors que la plupart ne cherchent qu'à enseigner, à avoir des disciples. Il lit, écoute, réfléchit, mûrit ses pensées comme ses sentiments. En cet état, il pèse le moins possible sur autrui : il ne cherche pas, au moindre désagrément, une oreille où déverser ses plaintes, il ne rend pas l'autre responsable de ses faiblesses et de ses incompétences, il ne peut exercer sur personne un chantage affectif. La solitude est bien une école de respect de l’autre et de maîtrise de soi.

    Couverture de L'esprit de solitude
    page(s) 44
  • Enfermés dans notre ego

    Nous nous sommes enfermés dans notre ego limité, dans nos constructions mentales. Nous avons perdu le contact avec la source de notre vie, avec ce qui existe avant notre naissance, avec ce qui existe avant que nous séparions « soi-même » et les autres. Toutes les religions tentent de nous ramener à cette réalité. La plupart du temps, cela se passe à travers de nouvelles constructions mentales qui s'ajoutent à nos constructions égoïstes et donc, cela crée encore plus de sujets de conflits et d'oppositions.

    Couverture de Le champ de la vacuité
    page(s) 9
  • Plus besoin de nous protéger

    Plutôt que de renforcer notre « moi-ité » et de nous justifier continuellement, nous devrions fonder notre vie sur quelque chose de plus puissant et digne de confiance. Si nous développons une réelle confiance en nous-mêmes, nous n'avons plus besoin de nous protéger constamment.

    Couverture de La pleine conscience en action
    page(s) 29
  • La joie parfaite

    La joie parfaite exclut le sentiment même de joie, car dans l'âme emplie par l'objet, nul coin n'est disponible pour dire « je ».

    Couverture de La pesanteur et la grâce
    page(s) 41
  • L'humilité

    L'humilité consiste à savoir qu'en ce qu'on nomme « je » il n'y a aucune source d'énergie qui permette de s'élever.

    Couverture de La pesanteur et la grâce
    page(s) 40
  • On ne peut offrir autre chose que le je

    Offrande : on ne peut offrir autre chose que le je, et tout ce qu'on nomme offrande n'est pas autre chose qu'une étiquette posée sur une revanche du je.

    Couverture de La pesanteur et la grâce
    page(s) 35
  • La tourbe des menus maux

    Sur la Voie de la technique, les illusions du Moi, par lesquelles nous croyons pouvoir masquer nos angoisses et maintenir un pseudo-confort physique et intellectuel, seront nécessairement bousculées. La Voie de la technique est un chemin de vérité. L'homme devient sage lorsqu'il accepte la maladie, lorsqu'il accepte la vieillesse, lorsqu'il accepte la mort et qu'il accepte ce que Montaigne appelle « la tourbe des menus maux ».

    Couverture de La sagesse exercée
    page(s) 21-22
  • Absence de consistance stable n’est pas absence

    Qu'arrive-t-il lorsque l'aptitude à prajñā se trouve orientée en direction de l'examen de la nature de soi, notre point de départ ? Aux premiers stades de la pratique exercée de śamatha, il est tentant d'assigner la notion vague du soi à un observateur abstrait ou à un témoin, une sorte d'instance qui sait. Dans la tradition, on appelle vijñāna (en tibétain : rnam she) ce niveau d'examen, et le terme lui-même indique une telle compréhension erronée. Aussi des notions de cette sorte comme celle d'observateur divisé ne peuvent-elles fournir une réponse satisfaisante à la question de la nature de l'ego ou du soi telle que nous cherchons à l'élucider. Cela contraste avec jñāna (en tibétain : ye shes), qui signifie une conscience où une telle division n'apparaît pas. […]

    Au fur et à mesure que l'examen se poursuit dans des séances répétées de śamatha, on commence à disposer de toute une série de variations concernant la nature des apparences, des moments de conscience. À partir de cette source de variations, on se met à entrevoir un point d'achèvement qui se remplit intuitivement de façon progressive. Une intuition commence à prendre forme : la nature du soi est précisément sa non-trouvabilité. Il n'y a rien à saisir qui ferait des personnes et des phénomènes ce qu'ils sont (en sanskrit : anātman ; en tibétain : bdag med gnyis). Cette expérience même d'ipséité se donne sous un nouveau jour comme n'ayant pas de consistance stable, mais comme n'étant pas pour autant de l'ordre de l'absence. C'est la même chose que de conclure, sur le plan conceptuel, que la nature du soi est śūnya, mais je préfère le présenter sous son versant manifeste, phénoménal.

    La traduction habituelle de anātman est « non-soi », ou bien « vide de soi ». Cependant, on est à nouveau trop proche de la langue bouddhiste d'origine. Ma description de l'introuvabilité, contrastant avec la manière habituelle de la rendre par le terme « non-soi », s'attache à ressaisir la texture de ce niveau d'examen de śūnya. Pour le pratiquant, anātman est manifeste, vécu comme surabondant : c'est un non-savoir qui réserve une foule de surprises.

    Couverture de Le cercle créateur
    page(s) 397-398
  • Comme si nous possédions une identité séparée

    Nous partons du flux continu de nos expériences, de nos pensées, de nos sentiments et de nos émotions, ce qui représente un héritage fondamental en Occident. Mais, dans ce contexte, le point de focalisation porte sur un type spécifique de phénomène : le fait de se reposer sans examen sur quelque forme d'identité personnelle ou de « soi ».

    Il ne s'agit pas nécessairement d'une notion explicite. Elle est implicite, et nous la partageons avec les jeunes enfants et les animaux. On applique une réduction dans le dessein d'examiner ses dimensions constitutives. L'enjeu consiste à prendre en considération les diverses manières selon lesquelles nous agissons comme si nous possédions une identité séparée ou substantielle, un soi à protéger, à promouvoir ou à conserver, un soi entendu comme une unité psychophysique inséparable. […]

    [C]e sont nos schémas habituels qui nous conduisent à agir comme si nous possédions un soi substantiel, et à lui attribuer, à lui et à notre monde, des qualités qui sont le fait d'une attitude qui ne s'est pas examinée elle-même. Or ces schémas ne résistent pas à une analyse approfondie.

    Couverture de Le cercle créateur
    page(s) 387-389
  • S’enraciner solidement pour s’épanouir

    De même que la cime de l'arbre ne s'épanouit pleinement que si celui-ci est solidement enraciné, de même l'esprit ne se développe dans sa vraie mesure que s'il ne renie pas ses racines, c'est-à-dire s'il conserve constamment en lui le sentiment de l'unité originelle de la vie, de cette unité dont la vie humaine, comme toute chose, est issue. Mais que l'homme perde le contact avec cette vie originelle par une tension exagérée vers le haut et il dérange l'équilibre de ses forces ; le Moi, imbu de son importance, lui cache la voie vers le développement de son être profond alors que sa véritable destination est de préparer et de protéger cette voie.

    Couverture de Hara
    page(s) 16
  • Devenir transparent au contact du réel

    [L]es exercices propres à la pratique du Zen ont pour fondement un principe de dignité humaine dont la justesse n'est plus contestée : l'homme a reçu le pouvoir et le devoir, à partir de certaines expériences et perceptions, ainsi qu'à l'aide de certains exercices, de se libérer du règne de la conscience statique du moi qui nous sépare de l'Être, de s'ouvrir à une dimension plus profonde, au Réel. Il peut et il doit devenir transparent à son contact, c'est-à-dire perméable à l'être essentiel qui est en lui.

    Couverture de Hara
    page(s) 9
  • Fantasme du moi

    L'idée d'une continuité de la conscience […] provient d'un effet de rémanence semblable à celui de la persistance rétinienne qui nous fait voir un cercle de feu là où il n'y a qu'une braise incandescente au bout d'un bâton tourné à bout de bras dans la nuit. Là où il n'existe qu'une conscience mentale strictement liée à chaque percept, et disparaissant avec eux, nous imaginons une conscience-en-soi continue, et donc un connaisseur-entité.

    Couverture de Zen et connaissance
    page(s) 24
  • La réalité une, divisée et fantasmée

    [D]ans le cours habituel des choses (saṃsāra), les signes distinctifs (lakshana) de l'image sensorielle objective sont aussitôt oblitérés par une computation avec les données subjectives, et donc teintés par les impressions psychiques. C'est lors de cet instant second de discrimination, qui fait intervenir une connaissance appropriatrice dont le fonctionnement implique le filtre binaire de désirs et aversions, qu'apparaît le moi. La réalité une est alors divisée et fantasmée comme un «  moi ici » et un « monde là-bas ».

    Couverture de Zen et connaissance
    page(s) 20
  • La fantasmagorie d’un moi

    Selon le Vijñānavāda, les expériences passées, conformément à la loi du karma, ont créé de fortes impressions intérieures (vāsanā, « imprégnation ») stockées dans notre conscience réservoir sus la forme de graines (bīja, ce qui signifie « graine, semence »). Ces germes, au sein de l'ālayavijñāna, s'influencent réciproquement et forment de puissantes et complexes configurations psychiques à partir desquelles s'établit dans la conscience (manas) une subjectivité personnelle qui avec le temps se consolide d'une part en images illusoires d'un monde solide, d'autre part en la fantasmagorie d’un moi.

    Couverture de Zen et connaissance
    page(s) 18-19
  • Toute affirmation positive reste de l'ordre de l'ego

    [S]i vous êtes noyé dans des pensées négatives sur vous-même, l'emploi d'affirmations positives telles que « Je suis en parfaite santé » ou « Je suis beau/belle et désirable » peut être un moyen important et efficace d'équilibrer temporairement les plateaux de la balance et de vous sortir de la posture négative. Toutefois, il ne traite pas le problème plus profond, qui est que vous êtes toujours au niveau des histoires que l'ego raconte sur vous. [...L']affirmation vient de la pensée, et la pensée n'est jamais autre chose qu'un instrument de l'ego.

    Selon moi, il existe deux sortes d'affirmations « positives ». Premièrement, il y a une reconnaissance de soi qui émerge spontanément, comme la réalisation « Je suis en parfaite santé » qui arrive sans qu'on la sollicite, sans aucune intention consciente. Immédiatement, vous savez que vous êtes en parfaite santé. [...]

    En revanche, lorsque vous employez intentionnellement une affirmation positive, son pouvoir de guérison est toujours inférieur à celui de celle qui surgit spontanément. Pourquoi auriez-vous besoin – sauf à vouloir restaurer un équilibre temporaire – d'affirmer quelque chose de positif sur vous-même, en dehors du fait qu'une partie de vous croit le contraire et qu'elle a peur de vos jugements et des émotions qu'ils créent ? Même si vous pouvez temporairement retrouver un certain bien-être grâce aux affirmations positives, vous n'en êtes pas moins en train d'énoncer aussi inconsciemment des jugements négatifs. Dès que l'effet de l'affirmation s'efface, le négatif refait surface, du moins tant que vous ne savez pas réellement qu'il est faux. Dans ce cas, bien sûr, vous n'avez plus besoin d'une affirmation positive.

    Un travail plus profond consiste à voir que vous n'êtes ni l'affirmation négative, ni l'affirmation positive – ce ne sont que des pensées.

    Couverture de Plénitude, empathie & résilience
    page(s) 158-159
  • Faire confiance et créer de l'espace pour les sentiments

    Pour votre ego, les émotions créées par vos pensées paraissent toujours légitimes et font véritablement partie de votre identité. Pour votre corps, en revanche, la colère, le ressentiment, la peur, la suffisance ou l'autodérision générés par vos pensées sont de vrais poisons chimiques. Le cerveau libère des neuropeptides dans votre sang et vos muscles se raidissent, votre tension artérielle augmente, vos glandes surrénales sécrètent du cortisol et la résistance à l'insuline est proche. Il existe un mot simple pour décrire ces symptômes : le stress. Le genre de stress qui conduit aux maladies cardiaques, au diabète, aux congestions cérébrales et probablement à certains cancers, sans parler du sentiment d'être malheureux.

    Ironiquement, alors que l'ego justifie des émotions pouvant être très destructrices, comme le ressentiment et la haine, il ne vous permet pas souvent de vous arrêter sur des sentiments expansifs, comme la joie ou l'amour, et il fuit instantanément tout sentiment menaçant, comme l'impuissance. Et pourtant, le fait de vous ouvrir aux sentiments les plus élevés et les plus bas ne vous blessera jamais autant que les émotions destructrices. En faisant de la place à ces sentiments, vous pourrez établir une relation plus saine avec des situations apparemment inextricables (conflits familiaux de toute une vie, par exemple). Vous écarterez également vos doutes sur votre propre valeur. Il est sage de se méfier de ses émotions et d'apprendre à se libérer de celles qui nous empoisonnent, tout en apprenant à faire confiance et à créer de l'espace pour les sentiments, y compris les plus sombres.

    Couverture de Plénitude, empathie & résilience
    page(s) 22-23